Christine 23 Onna – Shiny Crystal Planet



Hey, Children ! Leave Those Drugs Alone !





Dans ces pages, on a parfois le droit à des disques « Aliens Musicaux » car multi-genres, comme le dernier Subtle. D’autres arborent simplement cette belle étiquette car le son qu’ils crachent est absolument inclassable, inédit, fou, malade, avec un contenu tellement extraterrestre que même les mots peinent à décrire le tout. Cela en ferait presque peur, de se retrouver dans un monde aux facettes jamais effleurées par nos tympans, un maelstrom de sons, d’ambiances, de fresques sonores créées par un ou plusieurs psychopathes, en transe, que le résultat soit d’une violence ou d’un calme rare. Le genre de disque qui étonne, vous fait perdre pied, voir fait évoluer, encore et encore, votre « vision » de la musique. Gang Gang Dance ou Mr Bungle sont de ceux là.

Quand on découvre que Yamasaki Maso, véritable terroriste musical sous le patronyme M.A.S.O.N.N.A, fleuron de la Noise internationale, (à l’instar de son compère Masami Akita aka « Merzbow » avec qui il a formé les Flying Testicle ), s’associe début 2000 pour faire un disque avec une obscure (pour ma part) guitariste/bassiste, Toda Fusao, on sent directement que le disque ne va ressembler à rien de connu, que le résultat soit engageant ou non.










On rassure les oreilles sensibles, ce Shiny Crazy Planet ne versera pas dans l’ultra violence, dans la destruction exacerbée perpétrée par notre cher « Masonna » et ses machines sur ces anciens disques comme Frequency LSD ou Shock Rock (aka² au secours, mon matériel Hi-fi brule). On laisse les Live « je-saute-sur-mes-machines-comme-un-hysterique-pour-les-briser-mais-ça-fait-du-son-alors-c’est-cool », on abandonne enfin le coté indescriptible de son disque en diamant « Ejaculation Generater ». (Mais comment fait-il pour nous cracher des sons pareils ?). Masonna adoucit franchement sa recette, et cela bien justement, afin de ne pas noyer sa compagne sous un magma de machines. S’il ne tape plus avec le poing dessus, il prendra son pied en tentant « simplement » de déchirer ses outils à la serpe. La finalité de destruction reste la même, mais la forme en est plus subtile, moins violente, plus directe. Mais attention, en lisant ce paragraphe, on serait tenté de croire que Y.Maso s’est mis à façonner la Bande originale du prochain Dora l’exploratrice.
Rien de cela. Gardez en tête que le disque fera fuir de toute façon 99% des auditeurs, contre 99,99% avec ses précédents disques. Une bonne moyenne, un beau projet.
Les sons considérés comme inaudibles, pourtant inhérents à la Noise, comme le suraigu ou l’ultra-grave façon réacteurs d’avions seront donc absents. Mais la torture des machines, la force des tsunamis sonores sont toujours là.

Le statut d’alien du disque du jour est naturel dès que l’on cerne la teneur du disque : de la Psyché Pop-rock Noise. Ouaip, carrément. Et encore, se limiter à cette succincte description serait synonyme de passer outre un disque complètement unique, dans le fond comme dans la forme.
On pourrait même parler, en étant plus concret, d’une nana déroulant des rythmes Pop Rock Guitare/batterie un peu oldshool, le tout haché, défoncé, surplombé violemment (mais avec maestria) par la main sadique du monsieur.








Un exemple ? Suffit de prendre le premier titre, Drive To Crystal Planet. Et comme l’intitulé l’indique, c’est le meilleur des moyens pour se rendre compte du contenu du disque. Pour effrayer aussi, tant la première minute, flinguée de saturations et triturages sonores en tout genre, pour flinguer la tête des non initiés. Mais au loin, une rythmique déboule, irrésistible, comme échappée d’un morceau de Rock des 70s, endiablé. La batterie est affolante, la guitare pue le souffre, et le tout est écrasée par des hurlements, des typhons sonores, à faire fuir votre chat. Comme si un gigantesque robot se mettait en branle. Mais le tout reste entraînant comme l’enfer. Qu’une envie : remuer, danser, sauter dans tout les coins. Avant de se faire littéralement calmer par un break Indus / Noise qui coupe court à toute envie, qui vous pétrifie. Le son devient sourd, énorme, crade au possible, comme si vous fonciez dans un Tunnel sans issue, ne laissant que peu d’espace à la rythmique tentant de reprendre un minimum de sa superbe. Grosse claque. On croirait entendre la BO de Pulp Fiction se faire massacrer par un aliéné.

La rupture est tellement brutale qu’on a du mal à se rendre compte que Comic Jungle vient de débuter. Une jungle cette fois ci, les perçus tribales pétrissent vos oreilles et ne vous lâchent plus. Mais ces aborigènes ne viennent pas en amis, ils vous ont attaché à un poteau, et vous torturent avec une succession de sons craqués, criards, dégueulasses. Autour de vous, on frappe sur les tambours en se gaussant de vos yeux écarquillés. Ce titre, c’est un peu comme le premier sacrifice d’une tribu cannibale perpétué dans une usine. Et qui débouche directement sur deux frères bien plus avenants, Christine Hop 1 & 2 : Rythmique Funk et balayements successifs de scriiiiiiiiichhhfzzzzprrrffff, comme un oscilloscope crachant sa rage dans un haut parleur. On pourrait presque croire à un effet LFO ralenti au maximum, pour tenter de rendre ce dernier imposant comme la mort. Le deuxième des Christine Hop inversera la tendance, en reléguant la structure au second plan, laissant toute liberté aux samplers déchirés de Masonna faire leur petite guérilla. Ça hurle, ça craque, ça explose, tout se rentre dedans, s’envole pour mieux s’écraser. On s’imagine aisément l’énergumène pousser à bloc toute ses mollettes à effets la bave aux lèvres, afin de tirer la plus âpre sève de ses « instruments ».









Encore une fois, rassurons les mies de pain, Christine 23 Onna verse parfois totalement dans le rock, en ne le saccageant que de très loin, comme sur Mondo Nude Mode où une basse va claquer sur les notes d’une guitare dissonante. A contrario, on tombera aussi dans l’exercice purement Noise, avec l’excellent mais trop court Insect Voice qui aurait du prendre la liberté d’exploser, ou l’effrayant mur du son typique de ce mouvement sur New Dawn On Crystal Planet, qui nous fait hésiter entre une boite à rythme géante écrasant une ville d’oreilles sans pitié, ou un son de guitare répercuté et amplifié sur une façade composée d’une centaine d’enceintes.








Mais c’est quand les deux entités font corps qu’elles nous ravissent, nous impressionnent, nous casse juste la gueule. Le titre Groovy Spacy 70 est clairement le moment fort du disque, avec le titre d’ouverture. Apres une bonne grosse dose d’expérimentation et de bidouillage, le rythme s’emballe, le Rock hippy s’embrase, mais la profondeur du son est impressionnante. On nage en pleine pop psychédélique, les Pink Floyd ont lâché le L.S.D pour de l’héroïne injectée pure. Le tout est noyé par des masses de bruits, échos et tremblements. Même quand la structure se fait plus présente, le magma reste plus qu’hypnotique. On se croirait presque dans une pièce emplie de fumées multicolores, laissant perler des corps nus danser au ralenti, se mêlant les uns aux autres, le tout sous un flou à couper au couteau. Un vrai trip à l’acid je vous dis.

Quand à l’énorme Hypnosis, il ne pourrait pas mieux porter son nom. Avec ses sons 70s sexy en diable, il rassure. Mais un vrai édifice, un monument de sons effectue au dessus de la tête de la chanson des va et viens monstrueux, ravageant tout à chaque passage. Etant à l’origine une simple note de guitare dont le son serait décuplé, tordu, étiré, elle se mue en un vague énorme qui tourne dans votre tête, vous plongeant dans un état complètement extatique. On se prend une véritable bourrasque, à en oublier la gratte de base. Le vertige pointe, et l’on n’a rarement eu l’occasion de se plonger la tête dans un tel psychédélisme abstrait depuis des lustres.








« Il est cassé ton vieux disque de rock ? » « Arrête, tu vas griller ma chaîne ! » sont le genre de phrases qui pourront vous tomber sur le coin de la gueule si vous passez ce disque en public. Railleries ou incompréhension, il va être difficile de convaincre un proche du bien fondé de votre écoute en passant ce Shiny Crystal Planet. Et pourtant l’écoute autiste dans son casque n’est pas foncièrement optimale pour cette galette. Le bonheur, c’est de le mettre dans une pièce le son poussé au maximum, et de se laisser aller, affalé dans un canapé, avec ce que vous voulez dans les mains, pour se laisser littéralement bouffer, avaler, par la puissance et le caractère unique de ce disque. Il en fera fuir beaucoup, mais ceux qui se laisseront prendre dans ses filets ne devraient pas en ressortir indifférents. Pour les connaisseurs, on pourra parler d’une musique comme celle faite par les The 5,6,7,8s, ou d’un film de Tarantino passé à la moulinette, pour former un ensemble à la fois violent, expérimental et dansant. On adore ou on déteste, mais il n’y a rien de mieux qu’un disque qui provoque des réactions extrêmes. Véritable sabotage pour les uns, exercice unique et malade pour les autres. Pour ma part, c’est un peu des deux, et cela d’une façon totalement assumée par les artistes. Un disque qui, avec son confrère Acid Eater sorti deux ans plus tard, m’aura de toute façon profondément inspiré, et changé un petit quelque chose dans mon approche des musiques complètements hors catégories, déviantes et anormales. (Même si la norme est une donnée bien subjective…)

Et pourquoi pas donner envie d’aller titiller les productions bien plus rudes de Mademoiselle Anne Sanglante Ou Notre Nymphomanie Auréolé… (La signification du sigle M.a.s.o.n.n.a en fait, on se demande vraiment où le japonais est allé chercher ça…) même s’il faudra s’armer d’un sacré courage si l’on a jamais posé les pieds dans le style auparavant.


Shiny Crystal Planet ? Play it loud comme dirait l’autre. Mais very very loud alors, pour que cela en vale un minimum la peine.







12 titres – Alchemy Records
Dat’







  1. wony, visiteur Says:

    ca fait limite peur la…

    en tout cas, je connais pas du tout et je suis curieux de voir ce que ca donne quand même :/

  2. Aeneman Says:

    :sweat: et t’as même pas d’extrait? rohhhh de la noise pareille moi je veux T_T…

    Par contre je sens que ça va être chaud pour le récup lui…

    En tout sympa de nous faire découvrir tout ça…la scène jap est franchement méconnue (en dehors du syndrome JV et BO de jeux…. 😮 )

  3. Dat' Says:

    Ben j’ai des extraits, mais que du projet Masonna, pas de celui là. (onc rien à voir, ou presque, j’ai pas envie de bruler les enceintes de tout les PC passant sur cette page)

    Sinon, il est pas si difficile que cela à chopper, vu qu’il a une petite aura en Europe ce disque. Enfin va falloir bien creuser quand meme…

    je ferai surement un texte sur “Acid Eater” aussi, le deuxieme disque du groupe…

  4. Popof22 Says:

    Miam miam tout ça ^^

    Rha j’ai eu l’occaz’ de voir Masonna en live sur une vidéo, et ben franchement j’avais jamais vu un artiste aussi psaïko de chez psaïko.

    Taré le mec…

    Alléchante chronique pour changer 😉

  5. LordMarth Says:

    oh le con je connaissais celui là j’ai pu poser mes oreilles uniquement que sur le terrible acid eater, d’ailleurs si tu ne connais pas son side project sous le nom space machine fonce c’est du tout bon

  6. Henri Death, visiteur Says:

    je cherche le cd de acid now… pas facile à trouver. Où alors à des prix fou…

    Dommage

  7. Dat' Says:

    Effectivement, extremement chaud à obtenir. Et pourtant il vaut vraiment le coup…

  8. LordMarth Says:

    enfin chez toujours aussi bon comme came musicale aussi fou qu’acid eater son side project space machine déboite bien comme il faut aussi

    Yamasaki Maso je t’aime :p

  9. Dat' Says:

    Je crois même, si mes souvenirs sont bon, que ce Shiny Cristal Planet est un peu plus barge que le “Acid Eater” non?

    Enfin plus Noise quoi… (meme si je prefere Acid Eater d’une courte tête)

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