Oberto / Plaid – Matin Lunaire : Q&A

Posted in INTERVIEWS on May 20th, 2014 by Dat'



Matin Lunaire








Oberto / Plaid – Matin Lunaire (tu peux cliquer en HD plein écran c’est encore mieux)

Il y a des projets dont on voit la progression depuis le commencement, des bribes d’idées éparses à un produit final de folie. Des trucs qui me parlent, sonnent comme une évidence, parce qu’ils mêlent néons et beauté rousse, club triste et réveil lumineux. Qui parlent de cet entre-deux, ce moment coincé entre la lune et le soleil, notion qui m’est chère, où le temps n’existe plus vraiment, marchepied entre une veille débauchée et une aube vidée de toute âme dans des rues crades d’une mégalopole. Tunnel de Tori fluos pour trip légèrement drogué, Matin Lunaire retient aussi évidemment l’attention par la présence de Plaid, désormais habitué aux soundtracks, pour une cavalcade émo-fragile-téchno parfaite.

Ce qui suit n’est pas vraiment une interview, du moins comme je l’entends habituellement, car personne ne s’est retrouvé autour d’une bière pour discourir pendant des heures. En ce sens, les réponses peuvent sembler succinctes, mais il me semblait quand même intéressant de décortiquer le projet via les deux entités qui ont créé le bordel, histoire de donner quelques clefs que je n’aurai pas pu trouver en écrivant quelques lignes (et pour avoir l’occasion, aussi, de rebondir rapidement sur Reachy Prints). Et puis juste, c’est putain beau, c’est tout…


ENGLISH VERSION HERE



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– Première question évidente, pourquoi cette collaboration avec un réalisateur français presque anonyme à base ?

(Plaid) Après sa demande, on a fait quelques recherches, et l’on a tout de suite vu que le boulot de Clément était au dessus du lot. Les ébauches du projet étaient prometteuses. De plus, on aime beaucoup composer pour des films, donc forcément heureux de l’opportunité proposée.



– Quelle était l’idée principale de ce court métrage ? Et pourquoi Plaid alors qu’ils n’étaient pas vraiment dans l’actualité il y a 6 mois ?

(Oberto) Matin Lunaire pour moi c’est le moment ou la lune est encore visible dans le ciel en plein jour. On ne sait plus si c’est le matin qui se lève ou le soir qui se couche. C’est cette métaphore que j’ai voulu développer : l’entre-deux, le passage et les brumes de l’esprit.
Pour Plaid, j’adore leur musique depuis des années. La BO qu’ils ont composée pour Amer Béton a su porter le film au delà de tout ce qu’il était possible d’espérer, “white’s dream” par exemple est incroyable, c’est d’ailleurs un des référents donné au début de notre collaboration. Le fait qu’ils sortent un album ou non n’a pas été pris en compte, ce n’était pas le sujet à l’époque.



– Amer Beton, Heaven’s Door, Matin Lunaire… On dirait que votre musique n’est pas qu’un simple habillement d’image, mais participe vraiment à l’histoire du film…

(Plaid) Avec tous les projets que tu mentionnes, on a vraiment travaillé en étroite relation avec le film-maker. C’est difficile de retranscrire l’émotion d’un film en musique, c’est forcément subjectif, mais on fait de notre mieux pour complémenter la vision du réalisateur.



– J’ai cru comprendre que le processus pour choisir l’actrice principale sortait un peu de l’ordinaire…

(Oberto) J’ai découvert Lauren via le profil Facebook de Marielle Loubet (maquilleuse sur Matin Lunaire) avec qui je bossais déjà à l’époque. C’était il y a maintenant quatre ans je crois. J’ai flashé sur une miniature dans ses amis et j’ai cliqué dessus. Dix minutes après je lui écrivais un message pour lui proposer de bosser ensemble. C’est comme découvrir un artiste prometteur pour un label j’imagine, je savais qu’on pouvait faire de grandes choses ensemble ! C’était bien sur sans savoir qu’elle vivait à New-York et qu’il me faudrait attendre deux ou trois ans pour pouvoir la filmer…





– J’ai l’impression qu’il y a une dualité, un coté club-mélancoliquo-poétique dans Matin Lunaire comme dans pas mal de morceaux de Plaid (IO, Nafovanny, Unbank, Marry…) ?

(Plaid) Sortir en club et tout le reste, ça fait vraiment du bien et ça peut vraiment être quelque chose de positif sur un instant T, mais la fête s’arrête forcément à un moment ! Composer, c’est un processus un peu similaire, très positif, inspirant… mais il y a toujours dans la création des espaces éphémères, où une légère tristesse peut se glisser…

(Oberto) L’essence du clubbing c’est sortir de soi et se perdre dans la musique. Se défoncer ça aide c’est clair, mais la poésie dont tu parles c’est la nana avachie dans un canapé trop grand pour elle et le mec qui danse les yeux fermés depuis plus d’une heure… Dans Matin Lunaire il y a de ça c’est vrai; quand tout bascule et qu’on la retrouve toute seule au milieu des lasers sur son travelling invisible. Après je ne vais pas te dire tout ce que j’ai mis dans mon film mais ce passage est exactement l’illustration de ton concept de “club triste” qui colle avec une période bien particulière de la vie.



– Comment le morceau à t’il atterri dans l’album, alors qu’il était clairement composé pour l’album à la base ?

(Plaid) On s’est attaché au morceau, et on était en train de décider du tracklist final de Reachy Prints quand on l’a terminé. Ca correspondait bien aux autres morceaux, et Matin Lunaire était clairement un assez bon titre pour être inclus dans le LP.



– Justement en parlant du tracklist, Reachy Prints est clairement plus direct et condensé que les derniers albums. C’est une tendance que l’on voit pas mal en ce moment, vous vouliez vraiment faire un album plus court ?

(Plaid) – Pas vraiment… D’ailleurs l’album initial était bien plus long, on a finalement abandonné 3 morceaux au dernier moment ! Ils ne rentraient pas vraiment dans la cohérence du tout pour diverses raisons, et on s’est dit que l’album avait bien plus d’impact sans ces 3 morceaux.



– Il y a eu pas mal de réactions par rapport à l’artwork de Reachy Prints, qui sort un peu de l’ordinaire Warp/Plaid…

(Plaid) Les souvenirs, c’est le thème sur lequel on a travaillé avec cet album. L’artwork représente un tournant important dans la vie d’un artiste, une situation de vie ou de mort, et l’importance des souvenirs dans ces moments. La cover semblait parfaitement correspondre au thème de base.





– Sur le sujet du clubbing, question qui me taraude : j’ai entendu un jour un de vos morceau dans un club de strip/sm, pendant un show. J’ai trouvé ça super beau, mais j’ai eu pas mal de réaction après me disant que cette dualité dépréciait le morceau/groupe… Il y a toujours eu ce coté sacré de l’électronica ?

(Plaid) C’est des analogies, des comparaisons qui se créés dans l’esprit des gens, mais la musique reste inchangée quoi qu’il se passe. Tout le monde est en droit d’avoir un avis personnel, mais si quelqu’un passe une musique quelque part, c’est clairement parce qu’ils l’apprécient. Comment cela pourrait être mauvais d’être associé avec le plaisir ?



– Justement, sur les associations, on voit pas mal d’artistes hiphop sampler Plaid, BOC, Aphex en ce moment…

(Plaid) Nos racines musicales sont hiphop, et on en a composé avec des potes avec leur projet Kushti. Il y a cette distinction entre hiphop et rap, et la musique électronique qui nous avait inspiré à l’époque pouvait être aussi labellisée comme hiphop. On n’est pas vraiment bloqué sur un type de musique, les genres, c’est une notion qui ne veut pas dire grand chose.



– Les prochaines étapes ?

(Plaid) une tournée pour défendre l’album sur les prochains mois !

(Oberto) clips, pubs, fictions et voyages.




Dat’

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MC KAN (漢) INTERVIEW – French

Posted in INTERVIEWS on January 27th, 2013 by Dat'



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“Si le Japon marche sur ses deux jambes, c’est uniquement grâce aux connections entre la mafia, la police et la politique”




Je suis assez content de pouvoir publier cette interview, qui a littéralement du être arrachée avec les tripes. Plus de deux mois de tractations par email ont été nécessaires pour avoir cette entrevue, Kan et son équipe se demandant au départ pourquoi un français sorti de nul part voulait l’interviewer, lui qui n’a jamais (semble t’il) donné d’interview à des medias étrangers. Mais la publication de l’interview de Dj Krush aura permis de faciliter les choses, et de montrer patte blanche.

Grand amoureux du hip-hop japonais, je voulais absolument obtenir une interview de Kan, qui, en plus d’être un de mes MC japonais préféré, est figure incontournable du rap local, ultra respecté dans l’underground comme dans les charts. D’autant plus que le MC, contrairement à beaucoup de ses pairs, n’a jamais dévié de sa route, prônant depuis le début de sa carrière un rap sombre, dur, old-school, violent, à mille lieux de la guimauve synthétique fondue dans la J-pop.

Kan, enfin, a une personnalité assez rare dans le rap japonais actuel : si beaucoup de Mc nippons veulent se la jouer américain, exhibent des grosses bagnoles ou dansent dans des boites de nuits clinquantes, Kan fait parti des mecs qui viennent (vraiment) de la rue, et qui en parlent sans détour. Mais la donnée intéressante pour nos yeux de français, c’est justement cette définition de la rue, du crime dont on parle en chanson. Au Japon, pas de braquage et d’exhibition d’armes comme dans l’hexagone. Chez Kan, on est dans la mafia, la vraie : pots de vin à verser à la police, lien étroit avec les politiques, pote avec des gros bonnets de la prostitution. On nous a d’ailleurs bien fait comprendre qu’il fallait éviter quelques questions trop directes, que j’ai du rayer mentalement, à contre cœur.

Le jour de l’interview, fin novembre, on devait rencontrer Kan dans un coin du Kabukicho, et moi comme mon pote japonais qui m’accompagnait, on était pas forcément rassuré, vu la réputation du MC. La rencontre se fera finalement dans la suite d’un hotel 4 étoiles du quartier. Sur la table de la chambre, un détail choque : un sac d’herbe presque aussi gros qu’un ballon de foot trône sur la table. Ca peut faire rire, dit comme cela, mais il faut savoir qu’au Japon, la possession de cannabis est très durement réprimée, et il n’est pas rare de voir des gens (même des expatriés) faire un petit mois de prison pour une barrette de shit. Voir une telle dose de cannabis nous destabilise donc, vu que le mec n’allait clairement pas tout fumer dans la soirée. Au final, on comprendra plus tard que Kan doit tourner les derniers plans de son clip (que vous trouverez plus bas) et qu’il devait apporter de quoi filmer des images sympas. Ce qui conduira à quelques situations assez surréalistes durant l’interview, Kan enchainant les joints sans aucune pause.

PS : Vous trouverez de plus un lexique en fin d’interview, pour mieux comprendre certains termes difficilement traduisibles du japonais au Français !



Ou l’on parle donc avec Kan de la sortie de son nouveau disque Murdaration*, des liens étroits entre la mafia et la politique, de la présence des Yakuza dans le hip-hop, de son groupe MSC, de Dj Krush et de bagarres à Ikebukuro…




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– dat’ : Votre nouvel album, Murdaration, est 1er des ventes dans les plus gros disquaires de Tokyo, alors que votre Hip-hop est très dur, quasiment hardcore. Cela sonne presque comme une anomalie au Japon, où la déferlante d’idoles et boys bands semble impossible à stopper. Au final, quelle est la place du vrai hip-hop au Japon ?

Kan : Mon premier album solo avait été sorti il y a 7 ans, et pas mal de choses ont changé depuis, entre les nouveaux formats musicaux ou toutes ces conneries de CD vs mp3, poussant parfois les artistes à changer pour continuer à vendre leur musique. J’ai noté ces répercussions sur bon nombre d’artistes, mais de mon coté, je m’en fous complètement. La place du hip-hop au Japon ? On va dire qu’il y a toujours pas mal de gens qui pensent que cette musique se résume à “yo yo check this out”, mais les mentalités changent petit à petit. Les gamins qui écoutaient du rap il y a 15-20 ans ont grandi et sont adultes, et continuent d’écouter cette musique… le hip-hop n’est plus un nouveau mouvement.
D’ailleurs, il est maintenant possible d’avoir un rappeur dans sa famille, ou de connaître un pote qui fait du hip-hop, ce qui était très rare auparavant. Même des mecs qui travaillent actuellement pour le gouvernement, genre des fonctionnaires ou des flics, sont parfois des anciens rappeurs. J’imagine que cette évolution dans les mœurs ne peut qu’aider le rap japonais à être plus populaire, même s’il reste extrêmement underground par rapport aux autres genres musicaux à l’heure actuelle.



– dat’ : Les prods de Murdaration sonnent vraiment old school… On se souvient aussi de la grosse référence que vous aviez fait à NAS / Illmatic avec l’artwork de votre premier LP. Quelle est la place du hip-hop américain dans votre musique ?

Kan : Ah, l’artwork façon Illmatic… Mon premier LP a été sorti sur Libra Records. Au départ, on devait utiliser le Gremlins qui apparaît dans mon premier clip solo, mais le designer a tout changé au dernier moment, en trouvant une photo de moi jeune, pour en faire une cover à la Illmatic. Moi je n’étais vraiment pas d’accord pour valider cette pochette, on s’est pas mal pris la tête sur ce sujet, mais malheureusement, la deadline était déjà passée, donc j’ai dû m’incliner… Mais au final, tout le monde se souvient de cet artwork, et cela a dû pas mal aider mon disque à se propager, donc cela n’était pas une si mauvaise chose que cela. Le plus drôle dans l’histoire, ce que je ne suis vraiment pas un gros fan de NAS, sa musique ne me touche pas tant que ça. Mais évidemment, j’adore le hip-hop américain, même si je ne pige rien à ce que les MC racontent…
J’aimerai vraiment le hip-hop japonais devienne aussi balaise, ait la même qualité que le rap US. En parlant de connections, mon pote TAV aka Taboo1, de MSC*, était dans le crew des graffeurs français L.F.T… j’imagine que ce genre de connections nous aide à envoyer notre message depuis le Japon vers le reste du monde. Mon but ultime serait que les étrangers puissent se dire « ouais, il y a vraiment de très bons groupes dans le hip-hop japonais ». Pas juste les gaijins qui vivent à Tokyo hein, mais carrément ceux qui écoutent du rap en Europe ou aux US…



– dat’ : L’album Murdaration est bizarrement construit, on a au final un mélange de morceaux traditionnels, mais aussi des captations lives, du beatbox, des freestyles…

Kan : Alors justement, pour parler du freestyle… Il y a un bail, lors d’un festival à Kyoto qui réunissait un bon nombre d’artistes. J’étais dans les backstages, et j’entends un battle entre un gars nommé Meteor, et Ill-bosstino, le MC de Tha Blue Herb. Je décide de monter sur scène et je m’incruste dans le truc en balançant un freestyle avec les autres. C’était d’ailleurs la première fois que je rencontrais Ill-bosstino.
Bref, quelques années plus tard, ce dernier me téléphone. D’ailleurs, il n’a pas de téléphone portable, il avait dû m’appeler d’un numéro fixe, ce qui est assez rare au Japon (rires). Donc, Ill-bosstino, qui vit à Sapporo, voulait voir mon quartier, mon “hood”, donc nous sommes allé squatter la baraque de Taboo1, qui vivait dans le coin de Shin-Okubo à l’époque. On se met à fumer un max d’herbe, et on lâche quelques freestyles à nouveau, pour capter ça en vidéo. Au final, j’ai pris le son d’une de ces vidéos pour le freestyle de ce nouvel album !

Le manager se lève subitement, prend un déodorant en aérosol, puis sort de la chambre pour en asperger tout le couloir de l’hôtel de façon surréaliste, pendant quelques minutes, pour tenter d’effacer d’éventuelles odeurs de cannabis qui sortirait de la suite, histoire que la police ne déboule pas. Avec mon pote, on a envie de se marrer, mais on ne fait pas les cons.



– dat’ : L’instrue de 漢流の極論, de votre premier album, est surement l’instrue la plus dingue de tout le hip-hop japonais. Vous pouvez nous en dire un peu plus sur ce morceau ?

Kan : C’est Dj O-KI qui a produit le morceau. Pour l’anecdote, ce mec est un businessman maintenant, il travaille pour une société, il est « clean » désormais. Tu sais, au Japon, les BBoys doivent penser à leur futur, il y a deux paliers à ne pas manquer dans la vie, à 22 ans et à 30 ans. A 22 piges, la majorité des jeunes ont leur diplôme, et rentrent dans la vie active, abandonnant leurs rêves. Pour les autres, pour tout ceux qui étaient dans un groupe, qui avaient un parcours un peu marginal, c’est à 30 ans que la limite arrive. Si à 30 ans tu n’as pas réussi à concrétiser tes rêves, il faut absolument chopper le dernier train pour rentrer dans la vie active, sinon tu ne seras pas intégré dans la société japonaise.
Bref, avec DJ O-KI, on avait l’habitude de faire des concerts au club Harlem de Shibuya (Ndlr : légendaire club hip-hop de Tokyo). Je voulais quelque chose qui sonne bien ghetto, donc un soir je lui ai demandé de faire une instrue bien lourde, bien puissante. Il m’a proposé quelques prods, et quand j’ai entendu celle de 漢流の極論 je n’ai pas pu m’empêcher de balancer un “putain, celle-là est énorme !”.



La vérité, c’est que si les yakuza possèdent l’industrie de la nuit, il faut savoir que la police est tout autant impliquée dans le business des clubs”



– dat’ : Dans ce morceau 漢流の極論 justement, vous dites “si tu trahis dans le kabukicho*, tu perdras la vie”. On connaît plutôt bien ce qui se passe dans les ghettos américains grâce à leur hip-hop, mais c’est difficile pour les Français de comprendre les règles d’un quartier comme celui du Kabukicho… Et ce dernier tient une place très importante dans vos textes…

Kan : C’est assez différent. Pour moi, le Kabukicho est devenu l’endroit où tu sors, où tu te fais plaisir. Évidemment, j’ai vu plus de choses horribles dans ce quartier que n’importe qui d’autre. Pour moi, Kabukicho est un peu la ville invisible, celle que personne ne peut déchiffrer, personne ne peut réellement percer toutes les ombres imprégnant les rues de ce quartier. Surtout ces derniers temps. Je comprends que la majorité des gens aient peur des gangs, yakuza* ou teamers* qui peuplent les rues du coin. Mais je connais aussi pas mal de Japonais qui s’en battent les couilles, qui n’ont pas de préjugé et qui apprécient de traîner avec les gens du Kabukicho, qui sont bien souvent très sympathiques.

D’autant plus qu’il y a beaucoup de rappeurs, ou de mecs qui apprécient le hip-hop dans ce quartier. Un de mes potes est devenu un flic de la brigade Marubo (マル暴 une police spécialisée dans la lutte contre les yakuzas), mais il était DJ dans sa jeunesse ! D’ailleurs pour l’anecdote, un jour sa brigade est tombée devant mon crew… mon pote m’avait évidemment reconnu, mais la procédure l’obligeait à me contrôler quand même (rires). Il y a aussi des criminels, des meurtriers du quartier qui veulent changer de vie après leur peine de prison, et qui se mettent au rap. Ça, j’imagine que c’est un peu comme dans les autres pays… sauf qu’au Japon, personne n’en parle, c’est un sujet inexistant dans les médias.



– dat’ : Justement, en parlant de la police, vous pensez que le Kabukicho a changé ces derniers temps, avec les nouvelles lois anti-mafia instaurées par le gouvernement ? Ça a eu des répercussions dans votre rap ?

Kan : Bonne question, j’ai clairement ressenti ça. Après, tu peux être sur que ce quartier ne changera jamais complètement, il est impossible de lui couper ses racines les plus profondes. Sans tout le fric qui vient directement du quartier, Shinjuku* ne pourrait pas survivre. Shinjuku a un besoin vital de l’argent sale émanant du Kabukicho, c’est un fait.

Bon, tu es un étranger, donc tu dois absolument comprendre un truc sur le Japon : Si ce pays marche sur ses deux jambes, c’est uniquement grâce aux connections entre la mafia, la police et la politique. La culture japonaise elle-même se base sur toutes ces conneries, c’est dans notre façon de vivre. Encore plus dans la campagne japonaise, où ces gars se contactent constamment, avec de simples coup de téléphone, comme si tout ça était complètement normal.

A Tokyo, c’est un peu le même bordel. D’ailleurs, il y a quelques années, avec mon pote Shingo Nishinari, on a participé à des réunions officielles, des meetings pour parler des problèmes de quartier et compagnie. Dedans, tu pouvais y trouver des flics, des députés, des politiques… et toutes les organisations criminelles du coin. C’était excellent pour nous, ça nous permettait de faire un maximum de connections avec les politiciens (rires). D’ailleurs, on a même rappé devant eux, et les mecs nous applaudissaient, même quand on balançait nos textes bien hardcore sur la vie dans le quartier de Shinjuku. Ah, d’ailleurs, je connais un politicien assez connu qui écoute souvent le dernier disque de Shingo Nishinari dans son bureau ! (S’ensuit un discours un peu éclaté sur les liens entre la mafia et les politiques, difficile à comprendre) Tu sais, on a pas mal de dossiers sur des mecs qui trempaient dans des affaires louches au Kabukicho, et qui sont devenus soudainement connus en politique, ce genre de trucs.. et… euh… c’était quoi la question à la base ? désolé, je suis complètement défoncé là (rires)



– dat’ : (rires) c’était sur le Kabukicho, et…

Kan : Ah oui oui, c’est vrai… Ce quartier est quand même un peu différent de quand j’étais jeune. Adolescent, on arrêtait pas de traîner dehors tu sais, dans les parcs, dans les rues… on cherchait les endroits où il y avait possibilité de foutre le bordel (rires). A cette époque, il y avait pas mal de gangs de Teamers* dans les rues, c’était plus visible, surtout à Shibuya ou Ikebukuro. Pas tant que ça à Shinjuku d’ailleurs. Parce que ce quartier, c’était pour les “affaires entre adultes” tu vois ? Les jeunes ne pouvaient pas rester dans le Kabukicho, on devait attendre de prendre du galon pour traîner là-bas. C’était un endroit fascinant. Je suis allé à Hong-Kong, j’ai vu des endroits avec des “night views” qui avaient couté des millions de dollars… Mais le Kabukicho a toujours été l’endroit où l’on brassait le plus d’argent.



– dat’ : Et pour les étrangers qui se baladent dans le quartier ?

Kan : Mmmm dans les établissements, on n’accepte généralement pas les étrangers… Mais c’est surtout que les club à hôtesses et compagnie ne veulent pas avoir de problème. Si il y a des étrangers dans un bar à putes, les policiers et les yakuza vont forcément débarquer pour venir voir (rires). Tiens d’ailleurs, il faut savoir que la mafia possède et gère beaucoup de clubs, mais ce n’est pas trop le cas pour les événements hip-hop. Tu trouveras des yakuza dedans, mais ils ne gèreront pas le truc entièrement.



– dat’ : Ah, c’est un point intéressant, quel est le vrai lien entre les nightclubs « normaux » et les yakuza ?

Kan : Mmmm il y a beaucoup de clubs qui subissent des fermetures par la police en ce moment, pour des motifs parfois étonnants. Mais ils ré-ouvrent très rapidement en général, et ça, c’est évidemment grâce au fait que la mafia et la police sont en constante et étroite relation. Tout est une histoire d’argent et de business. D’ailleurs, c’est très difficile d’ouvrir un club de hip-hop sans avoir de connexion dans la police, ou sans connaître de flic bien placé. La vérité, c’est que si les yakuza possèdent l’industrie de la nuit, il faut savoir que la police est tout autant impliquée dans le business des nightclubs.

Pour en revenir à ta question, même quand je fais un live loin de Tokyo, dans la province japonaise, les boss des clubs ressemblent grave à des Yakuza. Ou alors, tu verras quelques signes qui ne trompent pas, genre dans les backstages, des bouteilles disposées sur une table de telle façon qu’elles forment un diamant, pour montrer que certaines personnes sont impliqués dans l’event (Ndlr : Le symbole du diamant est utilisé par l’une des plus grosses organisations criminelles du Japon). Ce genre de trucs arrive vachement souvent (rires) ! D’ailleurs, régulièrement, l’organisateur me demande “Hey Kan, tu es toujours dans « les affaires » ou pas ?” et je suis du genre “Non, maintenant, je fais mon biff grâce à la musique” (rires).



On n’est pas le genre de groupe qui utilise internet pour enregistrer un nouveau disque, à s’envoyer des couplets par e-mail, tout ça… Pour trouver l’émulation, on a vraiment besoin de vivre à coté les uns des autres, à traîner dans notre quartier…”




– dat’ : Ça fait maintenant longtemps que l’on a pas eu un nouvel album de votre groupe MSC*. Il n’y a pas de futur LP prévu en 2013 ?

Kan : Non, malheureusement, il n’y a strictement rien de prévu pour le moment. Je veux dire… on pourrait sortir un nouveau disque un de ces jours hein, on ne s’est pas du tout séparé, ce genre de truc. C’est plus comme si l’on était en hibernation pour le moment. Certains de nos membres, comme GO, font des trucs de leur coté… sinon 02 a une famille, et il vit vachement loin, à Okinawa… Et on n’est pas le genre de groupe qui utilise internet pour enregistrer un nouveau disque, à s’envoyer des couplets par e-mail, tout ça… Pour trouver l’émulation, on a vraiment besoin de vivre à coté les uns des autres, à traîner dans notre quartier… C’est pour ça que l’on a pas sorti de disque MSC depuis quelques temps.
Bon, il y a aussi un truc en plus, que je peux dire vu que c’est une interview française : on a un problème via le label, et on a pas réussi à arranger ça pour le moment. Si ça s’arrange, ça pourrait accélérer le processus.

Le manager se lève, redonne un coup d’aérosol, puis prend une serviette et la plonge sous l’eau, pour la poser contre la porte, pour colmater l’espace du dessous, afin de limiter les odeurs/la fumée de cannabis qui s’échappent de la chambre, déjà transformée en aquarium depuis longtemps. Les fenêtres des hôtels japonais ne s’ouvrent généralement pas. On reste calme, tout est normal.



– dat’ : Vous avez travaillé avec Dj Krush aussi. Du point de vu d’un artiste japonais, qu’est ce que représente Krush pour vous ?

Kan : Je vais te raconter une histoire que j’avais dis à Krush il y a quelques années : quand on était au lycée, j’avais un pote qui était à fond dans la musique de Krush, et il m’avait fait découvrir ça. Pour moi, c’était un peu comme le Wu-Tang tu vois, c’était vachement sombre, assez rude. C’était assez nouveau comme musique, je n’étais pas habitué, donc j’avais du dire un truc du genre “ouais c’est assez cool” mais pas plus. Ce n’est pas que j’avais détesté hein, mais ça n’avait pas été un choc énorme quoi, je n’étais pas devenu un fan complètement ouf de Krush sur le coup (rires).

Mais quelques années après, je l’ai vu à la télé, et il avait dit un truc comme “mon but est de faire connaître le hip-hop japonais à travers le monde, je veux que les pays étrangers écoutent nos sons, et c’est une des raisons pour laquelle je fais des tournées mondiales”. Moi j’entends ça, et je me suis dis “putain ce mec est grave cool !”. Évidemment, j’étais aussi au courant que ce mec était yakuza plus jeune, qu’il avait fait des trucs pas nets… Mais après avoir vu cette interview, j’étais vraiment en mode “Krush est un putain de boss !”. Donc j’ai pas mal freestylé sur ses morceaux, et petit à petit, il m’a demandé de travailler avec lui. J’étais vraiment heureux d’entendre ça, un putain d’accomplissement. La première version du morceau Mosa que l’on a fait a finalement été mise de coté par SONY, je n’ai jamais trop compris pourquoi. D’ailleurs, je n’étais pas ultra fan de cette version. Mais au final, un peu plus tard, Krush a sorti une version remix de Mosa sur son LP (Ndlr : Stepping Stones), et celle-là, elle est vraiment mortelle. Je suis vraiment heureux d’avoir pu bosser avec lui et j’espère bien un jour avoir l’opportunité de refaire quelque chose avec lui…



– dat’ : Autre chose, sur le lien entre le hip-hop et la culture japonaise… est-ce difficile d’être une fille dans le milieu ?

Kan : De mon point de vue, je pense que c’est vraiment cool de voir des filles MC. Ce n’est pas si difficile pour elles d’ailleurs, les filles peuvent parfois être meilleures, plus motivées pour montrer leurs talents de MC. Et évidemment, ça peut les aider si elles sont mignonnes. Pour le succès, ça dépendra si elles sont assez « bitchy », et si elles sont vraiment honnêtes vis à vis du hip-hop. Ca peut être simple de vendre le disque d’une fille juste à cause de son joli minois, mais si elles ont vraiment du talent…

Bon sinon, t’es un média étranger, je peux dire ça aussi : j’ai une femme, et elle faisait du hip-hop auparavant, et elle a grave du skills. Donc pour moi, les filles dans le hip-hop japonais, c’est quelque chose de vraiment cool.



– dat’ : Comme je le demande à chaque interview, vous pouvez nous conseiller trois artistes japonais que les Français doivent découvrir ?

Kan : Je vais dire BES du groupe Swanky Swipe… Anarchy, un MC de Kyoto… et Shingo Nishinari, évidemment. Il y a en a beaucoup plus que je pourrais citer… La scène hip-hop est vraiment intéressante en ce moment, il y a beaucoup à découvrir.



– dat’ : Oui, effectivement, il y a des tonnes de bons disques à Tower Records, mais par contre, j’ai l’impression qu’il y a un problème pour trouver de bonnes soirées hip-hop à Tokyo non ?

Kan : Ouais, c’est clair… J’aimerais vraiment voir un peu plus d’endroits cool qui passent du bon hip-hop. Surtout à Shibuya, c’est vraiment compliquer d’écouter de la musique de qualité en club ces temps-ci… //et à Ikebukuro ? // Ouais, j’ai des souvenirs incroyables de concerts dans ce quartier. Mais ce n’est plus vraiment la même chose désormais… Il y a quelques années, c’était complètement fou : des clubs blindés de monde, avec des bagarres et tout le bordel, on pouvait sentir une vraie rage qui émanait de l’audience, c’était vraiment mortel (rires). Mais des trucs pareils à Tokyo aujourd’hui ? Il n’en reste que très peu… Et c’est assez triste à dire, mais c’est un peu le même problème pour les vrais disquaires de hip-hop. Il y avait des tonnes de magasins à une époque, qui partageaient un vrai amour du rap, mais ils ont presque tous mis la clef sous la porte. Tu savais que Boot Street* a fermé ? pfff… Les bons endroits hip-hop sont difficiles à trouver désormais… Il faut vraiment que l’on se serre tous les coudes pour changer ça…





>Lexique, très simplifié, histoire de donner quelques clefs et mieux comprendre cette interview :

* Yakuza : mafia japonaise.

* Kabukicho : petit quartier au cœur de Shinjuku, centre névralgique des activités illégales du coin, et quartier historique de la mafia japonaise. En schématisant un peu, 90% du quartier est composé de clubs à hôtesses, établissements de prostitutions, jeux d’argent illégaux, love-hotels, boites SM, bordels à partouzes et compagnie. Tout en ayant cette réputation de quartier où toutes les envies peuvent être assouvies. Une bonne partie des commerces du quartier doivent encore payer un loyer, ou donner une partie de leurs bénéfices aux Yakuza. C’est aussi un quartier haut en couleur, avec des oasis dingues (salles de concert, bars expérimentaux) pour faire la fête, et des personnalités hors du commun que l’on croisera au détour d’une rue ou d’un verre de bière.

* Shinjuku : grand quartier de Tokyo, composé d’un grand quartier des affaires, d’une des plus grandes gares du monde, et de magasins par milliers permettant de mettre à mal son banquier. Dans Shinjuku, entre autres, quatre quartiers opaques, sans vie le jour, bouillonnants la nuit : la bordure de Shin-Okubo, (quartier coréen pas avare en love-hotels/prostitution), le tout petit Golden-Gai, (quartier historique bourré de petits bars et de repères d’artistes), l’excentrique Ni-chomé (quartier gay et lesbien de Tokyo) et le fameux Kabukicho.

* Teamer (à prononcer チーマー / cheema) : petites frappes, loubards, gang de jeunes japonais aux tenues parfois étonnantes, qui se baladent dans la rue pour chercher le conflit, et rentrer dans le lards d’autres bandes. A différencier des Bosozoku, (gangs à motos), ou des Yankees. Ces Teamers ont tendance à disparaître, ou du moins à être moins visibles dans les rues. Une photo ici pour donner un exemple de gang de Teamers.

* MSC : groupe originel de Kan, composé aussi de O2, Taboo1, GO, Primal et Dj O-KI, avant de s’agrandir graduellement. Représentants d’un rap gangsta et sérieux, avec une vraie culture hiphop, à l’opposé des groupes peuplant normalement le haut des charts japonais. Groupe indépendant, très respecté, mais ayant eu beaucoup de succès, MSC fut le fer de lance du rap “street” japonais des années 2000, malgré le peu d’albums sortis (seulement 2, plus quelques EP). On peut rapprocher cette formation d’un groupe comme Lunatic, ou d’un Wu-Tang (toute proportion gardée) à la japonaise.

* Boot Street : minuscule boutique hip-hop de Shibuya, qui doit pourtant être l’échoppe la plus respectée dans le mouvement. Elle apparaît d’ailleurs bien souvent en photo dans les LP japonais. Le RoughTrade du J-hip-hop pour schématiser. Tous les rappeurs japonais ayant un minimum de succès ont déposé un jour ou l’autre une mixtape là bas.

* Murdaration : Nouveau disque solo de Kan, 7 ans après 〜みちしるべ〜. Ce nouvel LP est étonnamment construit, entre vraies tracks, beatbox, freestyle et lives. Mais il garde cette ligne très brute et old-school chère à Kan et MSC en balançant de vraies bombes. Il contient de plus certains des plus beaux morceaux de hip-hop japonais de ces dernières années, comme le superbe インナー・シティー・ブルース avec AXIS, ou le single I’m a ¥ plant. Les productions ultra bien foutues de DJ琥珀 y sont pour beaucoup.





MC Kan (漢) – I’m a Y Plant





MSC – 音信不通









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J’place une dédicace à Myuji, sans qui l’interview n’aurait pas pu être possible, et Daz as usual




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DJ KRUSH INTERVIEW – French

Posted in INTERVIEWS on October 28th, 2012 by Dat'


CLICK HERE FOR THE INTERVIEW IN ENGLISH



“J’aimerai à nouveau retravailler avec des MCs japonais pour mon prochain album”



Cette interview de Dj Krush a une longue histoire, qui remonte maintenant à il y a 5 ans. Les lecteurs parcourant ces pages depuis un bail se souviendront peut-être de l’anecdote émanant de l’interview d’Antipop Consortium. Accrédité lors des Nuits Sonores de Lyon, je devais interviewer Dj Krush. Ce qui, à l’époque, revenait à dire que j’allais bientôt poser un pied sur la lune, tant le japonais a joué un rôle gigantesque dans ma vie musicale. Malheureusement, l’entrevue avait été annulée à la dernière minute (ce qui était synonyme de fin du monde dans mon petit coeur), l’orga du festival me demandant en plus de remplacer un journaliste pour l’interview d’Antipop Consortium, faite donc en mode improvisation totale au milieu d’autres médias. Mais ce n’était que partie remise. Une nouvelle interview aurait pu être décrochée pour son passage en suisse quelques mois après, mais sans suite donnée malgré l’accord des organisateurs… Arrivé au Japon, on me dit que rencontrer Dj Krush relève du quasi-impossible, l’artiste étant une institution dans le pays.
Effectivement, cela aura été difficile. Mais après moultes tractations, et grâce à l’aide de Hennessy Artistry qui organisait un concert de Dj Krush x Large Professor (Main Source), on a pu finalement avoir un peu de temps avec Dj Krush, légende du hiphop, et l’un des pères de l’abstract. Evidemment, vu le statut de Krush au Japon, l’interview fut bien plus cadrée qu’habituellement (pas de chat et bières à outrance comme avec Doseone, de crêperie avec Grems ou de plateau de fromages avec Raoul Sinier), avec un timing assez serré et des managers très présents. Reste qu’au fil de l’interview, le propos va se délier, les rires aussi, pour des réponses souvent très personnelles.

Où l’on parle donc de son nouvel album à venir, de Hiphop Japonais, d’influences US, d’hommage, de hard-rock et d’une technique de drague.



Dj Krush sortira 3 Ep réunissant ses “monthly releases” de 2011/12 début décembre… et un nouvel album mi-2013.



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– dat’ : Pour vos 20 ans de carrière, vous avez sorti un morceau tous les mois entre 2011 et 2012. Pourquoi avoir fait ce choix inhabituel, au lieu de les compiler dans un “vrai” album ?

DJ Krush : Clairement, la façon de vendre de la musique a changé depuis quelques années. Au départ, on avait du vinyle, puis on est passé sur le CD, et maintenant les CD ont muté en simple “fichiers” numériques, qui se baladent sur le net. Moi, j’ai clairement grandit avec les vinyles et les CD, donc on a tenté ça, comme une expérience, un test. De faire rentrer Krush dans l’ère du numérique. Et c’était une bonne expérience de faire cela en vendant ma musique sur le net avec cette formule “un single par mois”.



– dat’ : Vous semblez toujours prendre une direction différente à chaque nouvel album, parfois comme une réaction au précédent LP. Ces dix morceaux sortis entre 2011 et 2012 était très progressifs, avec beaucoup d’instruments lives, certains étaient très mélodiques… mais votre site officiel décrit le prochain album à venir comme étant radicalement différent de ces “monthly releases”. Pouvez-vous nous donner des indices sur la direction prise sur votre prochain album ? Sortira-il en 2013 ?

DJ Krush : Comment dire… Pour l’anniversaire de mes 20 ans de carrière, j’ai été dans plus de 20 pays en 6 mois. Evidemment, en France également. Au cours de ces voyages aux 4 coins du monde, j’ai été énormément influencé par la culture de tous ces pays. Je suis en train de placer toutes ses influences dans mon nouvel album. C’est encore trop tôt pour dire comment l’album sonnera de façon exacte, mais il sera clairement ouvert sur ces voyages.

Je pense… enfin, j’espère, que l’album sortira dans la première moitié de l’année prochaine. Avant l’été ! Là je suis encore dans le stade d’écriture des morceaux, de la confection de nouveaux sons.



– dat’ : Vous avez toujours travaillé avec les meilleurs MCs, voir des légendes du hiphop américain. Mais cela fait plus de 7 ans qu’il n’y a pas eu d’album de “Dj Krush”, et les choses ont pas mal changé dans le Hiphop US. Quels sont les MCs actuels qui vous inspirent, ou avec lesquels vous aimeriez travailler sur le prochain album ?

DJ Krush : C’est difficile à dire. Il y a tellement de grands MCs, partout dans le monde, en incluant le hiphop français aussi… J’ai l’impression que le hiphop est devenu encore plus puissant et présent qu’à l’époque de mon précédant album. Je parlais des influences de différents pays pour mes sonorités, mais pour les MCs, j’aimerai vraiment recommencer à travailler avec des Japonais. Il y a vraiment de très bons rappeurs au Japon ! Donc pour mon prochain album, j’ai vraiment envie d’axer mes recherches de MCs sur ce critère.



– dat’ : En interviewant DoseOne cette année, il a confié être venu au Japon la première fois car vous vouliez travailler avec le crew Anticon. Pouvez-vous nous dire pourquoi étiez-vous si intéressé par la musique d’Anticon, et comment était-ce de travailler avec ces mecs ?

DJ Krush : Oh, il se souvient de ça ? C’est drôlement cool ! (rires). Ce mec est mortel. Vraiment, c’était génial, on s’était vraiment bien marré, sans calcul, de façon très spontanée. Pourquoi Anticon ? Parce qu’ils avaient tous, chaque MC, de très fortes individualités, ils étaient tous très originaux dans leur approche du hiphop. Donc il fallait absolument que je les contacte, ne pas passer à coté (rires)



– dat’ : Les événements organisés par Hennessy Artistry, tentent toujours de donner la possibilité de réunir des artistes d’Europe ou des USA avec des musiciens japonais (ndlr : à l’instar de C2C et Tucker). Ce soir, c’est vous et Large Professor qui partagez la même scène. Que pensez-vous de ce concept ?

DJ Krush : Vous savez, il y a tellement de problème dans le monde en ce moment. La musique, je ne sais pas si ça peut changer… comment dire, je sais que certains ont une opinion différente sur ce point, mais pour moi, en tant qu’artiste, je pense que qu’il faut avoir un maximum de connexions, d’échanges… surtout dans le hiphop ! Il faut faire les choses ensembles, faciliter le partage. Donc l’événement de ce soir a une forte signification pour moi, cela véhicule quelque chose d’important. On devrait faire ce genre de concerts beaucoup plus souvent. Comme je disais, il y a beaucoup de conflits et de problèmes entre certains pays, entre certaines cultures… mais bon, au moins, dans le monde de la musique, on a tous envie de se serrer les coudes non ? (rires) 



– dat’ : Et Main Source (le groupe de Large Professor) a été une influence sur votre façon de faire du hiphop, au tout début des années 90 ?

DJ Krush : J’ai ENORMEMENT écouté Main Source. Enormément ! Je dois avoir tous les albums en version originale, et tous leurs EP aussi ! Le Hiphop est né aux USA. Nous, au Japon, nous avons étudié le mouvement, nous avons appris, nous avons été façonné par le hiphop US. Donc je suis vraiment heureux d’être sur la même scène que ces artistes là. C’est une des raisons pour lesquelles je suis heureux d’être encore DJ. On doit même faire un morceau ensemble ce soir, mais on l’avait un peu oublié à la répétition (il part dans un fou rire). Mais bon, ça devrait quand même aller ! (rires)




“Dans ce film, les mecs, au lieu de se battre à coup de flingues, s’affrontaient avec des micros (…) ça m’a montré une alternative, ce fut un electrochoc”




– dat’ : Vous avez souvent parlé du fait que le film Wild Style avait été l’élément déclencheur de votre carrière dans le hiphop, que vous avez découvert le mouvement via ce film. Vous en portez même le tee-shirt ce soir. Mais je voulais vraiment savoir : comment êtes-vous tombé sur ce film ? Comment un jeune japonais pouvait aller voir Wild Style sans rien connaître du hiphop ?

DJ Krush : (il éclate de rire) Oui, je me souviens, c’était dans un cinéma du Kabukicho (ndlr : quartier chaud de shinjuku, où se concentrent les yakuzas) ! Alors moi, je n’étais pas tout seul pour voir le film, j’étais avec une nana. Cette fille, c’était… comment dire… une fille du kabukicho, qui travaillait dans les bars louches du quartier (ndlr : Impossible de réellement traduire “kabukicho girl”, englobant les hôtesses de bars comme les stripteaseuses ou les prostituées). Vraiment, on avait aucune idée de ce qu’était le breakdance… ni même le hiphop !! J’étais donc en “date” avec cette fille, on avait juste du temps à tuer,  donc j’ai vu l’affiche, et on y est allé un peu au hasard. Il n’y avait pas grand monde dans la salle d’ailleurs…
Le film parlait donc d’une culture de bandes, de mauvais garçons, sauf que les mecs, au lieu de se battre à coup de flingues, ils s’affrontaient avec des micros ! Moi j’étais dans un gang et tout plus jeune, j’ai fais des sales trucs à Shinjuku à l’époque… c’était totalement lié avec le film, mais ce dernier me montrait une alternative, ce fut un électrochoc ! Donc voilà, je ne savais pas où je mettais les pieds en allant dans ce cinéma, c’est arrivé comme ça.

– dat’ : Et la fille ?

DJ Krush : Je l’ai oublié (rires) Je crois qu’elle m’avait dit en sortant du cinéma qu’elle n’avait pas pigé grand chose…



– dat’ : Mais dans ce cas, si vous avez découvert le hiphop avec Wildstyle… quel était votre lien avec la musique auparavant ?

DJ Krush : Je faisais des percussions dans une fanfare en primaire (il éclate à nouveau de rire) ! J’adorais la peinture aussi. Sinon après, adolescent, j’étais dans un groupe, et on faisait du gros hardrock façon Led Zeppelin, Deep Purple ou Black Sabbath ! Des trucs dans le genre. Cela m’arrive encore de passer un peu de Led Zeppelin dans mes mix d’ailleurs. Sinon j’écoutais vraiment pas mal de genres musicaux même étant gosse. Donc, j’écoutais beaucoup de rock, Eikichi Yazawa, Carol… du punk aussi, avec les Sex Pistols, The Clash, The Damned… J’ai écouté aussi de la musique électronique, genre The Human League. En fait, je me foutais un peu des genres musicaux, je n’ai jamais trop réfléchi comme cela, j’écoutais juste la musique que je trouvais “cool”. Peut-être que l’on retrouve un peu cela dans mon hiphop…



– dat’ : A l’instar de new York pour le rap US, pour vous, quel est le rôle de Tokyo dans le hiphop Japonais ?

DJ Krush : Dans les textes… Comment dire… je vis à Tokyo… mais justement, ces temps ci, il y a tellement de type de hiphop diffèrent au Japon ! D’ailleurs, moi personnellement, je ne sais même pas si je suis hiphop ou non. Ou plutôt, dans quelle case du hiphop ma musique est classée. Aujourd’hui, je vais mixer du rap, mais ça peut changer le jours d’après, comme je disais, je joue des morceaux sans distinction de genre. A Tokyo, j’imagine qu’il y a des artistes vraiment “hiphop hardcore” qui pourraient bien mieux répondre à cette question (il écarte les bras, et mime un arbre avec pleins de branches représentant le hiphop, et pointe son doigt très loin du milieu de l’arbre, sur le coté). Moi je pense que dans le hiphop, je suis vers là, sur cette petite branche (rires) !



– dat’ : Beaucoup de Français ont découvert Tha Blue Herb avec votre mix Code4109, et Candle Chant de l’album Zen. Maintenant, quand on parle de hiphop japonais, on cite obligatoirement ce groupe, comme étant consideré comme l’un des meilleurs groupes de hiphop japonais. Mais vos morceaux ensemble remontent à loin… Vous avez toujours des connections avec le groupe ?

DJ Krush : En France ? C’est vrai ? Cool ! Les textes de Tha Blue Herb sont aussi bien écris qu’un vrai livre. Ils ne parlent pas que de sexe, de bagnoles etc… On se croise toujours, on est parfois booké sur le même concert, le même festival. Oui j’aimerai vraiment refaire quelque chose avec eux… mais ils sont vraiment très occupés en ce moment !



– dat’ : Il est impossible pour nous de comprendre les lyrics de Candle Chant, morceau composé avec Tha Blue Herb, pourtant, elle est tout le temps citée dans les “meilleurs morceaux de Dj krush”. Le titre précise que c’est hommage. Pouvez-vous nous en dire plus ?

DJ Krush : (il réfléchît longuement) Candle Chant, c’est un morceau parlant d’un Japonais que j’ai connu, qui était métisse japonais/noir américain. Il est mort d’un cancer. C’était un vrai fan de hiphop, il rappait d’ailleurs, et il était fan de ma musique. Je l’avais rencontré à l’hôpital, et il voulait absolument faire quelque chose avec moi. Donc, on s’était mis d’accord pour faire un morceau ensemble, mais malheureusement, il est mort avant que nous puissions commencer. Donc Ill-Bosstino et moi, on a décidé d’écrire quelque chose ensemble, en hommage, et ça a donné Candle Chant. Ce mec avait vraiment du talent. Malheureusement, il se faisait harceler et subissait des brimades au lycée, parce qu’il était métisse, ce qui est parfois mal accepté au Japon. Mais lui voyait ça de façon positive, il me disait “j’ai deux sangs dans mes veines, deux cultures, donc je suis deux fois plus fort !” et ça me touchait vraiment. Au Japon, très peu de gens réagissent de cette façon quand ils subissent le racisme au quotidien vous savez…. C’était vraiment un type bien, donc voilà, on a fait ce morceau pour lui.



– dat’ : Dernière question que je me dois de poser à chaque interview… pouvez-vous nous conseiller trois artistes à écouter ?

DJ Krush : Nous en parlions tout à l’heure, je conseille évidemment d’écouter Tha Blue Herb. Leurs morceaux sont tellement novateurs. Ca serait vraiment bien que les gens comprennent leurs textes, ça serait encore mieux. Qui d’autre conseiller… C’est difficile en fait. Vu que je suis en train de composer mon nouveau disque, je n’écoute pas trop ce qui sort en ce moment, car j’ai trop peur de me faire influencer par ces derniers (rires).
Dans le hiphop japonais, je reçois énormément de démos et de mixtapes de MCs voulant travailler avec moi, il faut que je me concentre là dessus aussi, comme je disais tout à l’heure. Donc pour vous conseiller des artistes… laissez-moi écouter ces démos, et vous verifierez les MCs qui seront sur mon disque  (rires) !




Photos Dj Krush x Large Professor / 14 Octobre 2012:





Dj Krush – Kemuri





Dj Krush – Candle Chant feat Tha Blue Herb





Dj Krush – Only the Strong Survive feat CL Smooth





Dj Krush interviewed by dat’ / Chroniques Automatiques / FACEBOOK

All photos by Dat’ / Chroniques Automatiques

Check Henessy Artistry website and videos here http://www.hennessy-artistry.jp

Big shout to Henessy Artistry, Syn Song, James, Asai-san, Séchilnyu and my mates Daz & Myuji





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DOSEONE INTERVIEW (Themselves, Subtle, 13&God, Clouddead) – French

Posted in INTERVIEWS on May 20th, 2012 by Dat'



“Il y a pas mal de gens qui ont un problème avec la façon dont je fais du hiphop. Mais entre moi et le hiphop, ya pas de problème, on est ensemble pour la vie…”




Pour la première fois, Doseone venait au Japon sans sa bande pour presenter son prochain album solo, G is for Deep, à sortir sur Anticon. Au départ pour un concert lors d’un gros festival organize par Kaikoo – Popgroup, label chapeauté par Dj Baku, Doseone a au final pu faire un petit concert à Tokyo la veille, pour les gens ne pouvant pas se déplacer sur une journée entière. Ceux qui suivent ces pages depuis des années savent combien je suis fan de ce type, et de ses differents projets. Du mythique Clouddead au hiphop Themselves, en passant par les sublimes perles pop de 13&God et les experimentations de Subtle, le fondateur d’Anticon a toujours défonçé mes tympans, depuis plus de 10 ans maintenant.

A partir du moment où le mec posait le pied au Japon, il me fallait absolument une interview. Vu que Doseone s’est pointé vraiment tout seul dans le pays, cette interview se transformera au final en un weekend entier, entre ballade chez les yakuzas du kabukicho, un Cat Café bourré de félins calins, pas mal de bières, un bar spé dans le hardcore, son concert et des taxis à 3h du mat’.

Hors interview, le bonhomme parlera pas mal de politique americaine et française (veille du premier tour des présidentielles dans l’héxagone), de chats, de son aventure 13&god, de sa vie a San Francisco, de son morceau avec TTC pas d’armure, de sa fascination pour les japonais completement bourrés que l’on croise dans la rue le weekend, des français très “Fin de l’épice”, et encore de chats, de chats, et de chats. Toujours avec un sourire jusqu’aux oreilles et une générosité assez incroyable.


– Rencontre donc, où l’on parle longuement de son nouvel album solo, de son projet Nevermen avec Mike Patton et Tunde Adebimpe, de Freestyle, de gamins super chauds, de Tyler & Asap, de chats, et de l’état de la musique actuelle. Et surtout de cette passion inénarrable qu’a Doseone pour le Hiphop.






– dat’ : Avec ton nouvel album, G Is For Deep, il semblerait que pour la première fois, un solo de Doseone ne sorte pas de façon confidentielle, sans promo… ?

DoseOne : Pour être honnête, les disques Ha et Skeleton Repelent étaient des recueils que j’avais fais entre deux albums avec mes groupes. Pas vraiment en mode side project, surtout des choses que je ne pouvais pas garder pour moi, des morceaux que je faisais parfois seul la nuit avec mon chat à coté, et au final, en passant en revu 4 ans de création je me disais “tiens cela pourrait faire un disque !”. Alors que pour G Is For Deep, je voulais faire un vrai album, qui contenait des morceaux que l’on peut chanter, des morceaux que je pouvais écouter à toute heure.



– dat’ : Oui le disque semble vraiment plus ouvert, moins expérimental… C’est à cause de la musique que tu as fais récemment avec Subtle ou 13&God ?

DoseOne : Non pas vraiment… c’est juste moi sur ce disque. Je voulais ce solo plus direct qu’avant… Il y a moins de mots, moins de réflexion. J’ai produit dix instrues. J’en laissais tourner une pendant des heures, je me bourrais la gueule et je chantais dessus. J’ai fais toutes les chansons de ce nouvel album completement bourré. Et le matin suivant, j’y revenais en mode sobre, avec du café, et une approche super critique. Le truc, c’est que je suis vraiment un rapper à la base, et je n’ai pas vraiment de connaissance en chant. Si tu me donnes un micro et que tu me demandes de chanter un truc, je ne pourrais rien faire de bien. Donc j’avais clairement besoin d’être vraiment moi même, de me laisser aller et de me lâcher un peu. D’où le principe de se bourrer la gueule la nuit, et de remodeler le lendemain ce qui avait été fait la veille. Tout ce qui en est sorti pour l’album est “pur”, c’est plus spontané, immédiat, je me cache moins derrière ce que je veux dire.

Je renverse ma bière sur Dose, il y en a plein la table, un serveur japonais arrive, catastrophé en tentant de nous essuyer. Doseone se lève et hurle “it’s party, take off your shirt !!!!!” le serveur flippe et ne sait plus quoi faire. On tente de reconnecter l’interview.



dat’ : Oui, car G Is For Deep sonne Hiphop, mais aussi aérien et enjoué, avec de la pop et autres, contrairement à tes anciens solos… comment pourrais-tu définir ce G Is For Deep?

Doseone : Ben, j’ai évolué au final. J’ai essayé de créer quelque chose qui sonne naturel et direct. C’est assez nouveau pour moi, je n’avais jamais vraiment produit mes propres trucs avant. Comment je pourrais définir le disque ? Sincèrement, je ne sais vraiment pas ce que ça peut être, pour être putain d’honnête (rires). Je pense que c’est du R’n’b. Franchement, je déteste la plupart de ce qui se fait en R’n’b, mais sur mon disque, c’est plus du “Doseone-R’n’b-alcoolisé” (rires).

Pour tout dire, je pense avoir pas mal innové et apporté des choses dans le hiphop, dans le rock, dans l’art en général… mais presque personne n’en a jamais rien eu à foutre ! Donc je m’en balance, je fais mes propres trucs maintenant et je me fous du reste. Tu sais, je n’ai jamais rien gagné avec ma musique… juste des dettes ! C’est pas très grave, car j’ai toujours fais ça pour des bonnes raisons, mais je suis à un point où la musique que je fais doit d’abord être faite pour moi et mon entourage. Pas de façon égoïste hein, quand je dis “moi”, j’englobe tout ceux qui aiment et écoutent ma musique. Donc voilà, je ne me prends plus la tête, j’adore ce que j’ai fais avec ce nouveau disque, c’est tout, et c’est vraiment le plus important.



dat’: Ce qui est sur, c’est que quand on te voit en live, on comprend clairement que tu es investi à mort dans ta musique… !

Doseone : Ouai, mais ça m’a pris pas mal de temps. Faire un concert, être sur scène, c’est moi à 100%. Je suis juste vraiment heureux, j’ai une heure pour faire ce que j’aime le plus. Ce soir, c’était un peu different car c’était vraiment la première fois que j’étais seul sur scène, de bout en bout, donc c’était assez stressant. Et les chansons, normalement, il faut les jouer au moins 20 fois pour qu’elles deviennent ce qu’elles doivent vraiment être en live. Donc ce soir, c’était le tout début du processus. Mais c’était cool. Après quelque temps, certains morceaux commencent à te saouler à force de les jouer, mais là, c’est que des nouveaux titres, donc je suis super heureux (rires)




“Mes élèves ? Peut être qu’ils pensent… que je suis complètement taré”



Bon, parlons sérieusement. Tu as parlé plusieurs fois, il y a quelques temps, de Nevermen, ton futur groupe avec Mike Patton (Faith No More, Mr Bungle…) et Tunde Adebimpe (Tv On The Radio). Mais au final, on n’a toujours rien de concret. C’est toujours d’actualité ce projet ?

Doseone : Oui bien sur ! Bon, comme dans Fightclub, il n’y a qu’une règle dans Nevermen : ne pas bâcler les choses. Donc on prend notre temps, pour que tout soit parfait. Mais ça va sortir ! j’espère en fin d’année… Tu imagines bien que Mike Patton est super occupé… On chante tous les trois sur le disque, et il est produit par Patton et moi. J’ai fais tout le boulot de production initial, et j’ai envoyé ça à Patton. Donc maintenant, on attend qu’il me renvoie le tout.

Pour ce disque de Nevermen, il n’y aura aucun morceau en solo, tout est fait à trois. On a essayé d’entremêler les voix, que toutes les parties chantées soient faites avec Tunde, Patton et moi, je crois que l’on ne fait même pas un couplet seul sans les autres. Tu te souviens comment CLOUDDEAD marchait ? Et bien j’ai essayé de tirer un maximum de cette expérience, et de faire un truc parfait. Je veux que pour les mecs comme toi qui aiment les trois chanteurs, votre tête explose littéralement du genre “aaaaaah putain mortel ils sont tous là” (rires). Mais bon, on veut vraiment chiader le truc, et prendre notre temps. On ne veut pas faire comme le disque tout pourri de N.A.S.A là (rires)



J’avais posé la même question à Raoul Sinier lors de son interview : tu as un lien très fort entre ta musique et ton art, avec tes peintures, figurines et autres… c’est quelque chose d’indissociable ?

Doseone : Ca fait vraiment parti de ma musique effectivement. Je pense qu’une partie de ma musique et de mes textes viennent de là. Ils viennent de pleins de sources différentes, mais l’art en fait parti. Je mets toutes mes émotions dans la musique, mais aussi dans le dessin… Ah par contre, pour le nouveau disque, c’est quelqu’un d’autre qui a fait l’artwork, c’est la première fois ! Donc on ne verra pas de squelette sur l’artwork pour une fois ! (rires). C’est une décision que j’ai prise avec Shaun, le mec qui dirige Anticon. Je m’étais tellement investi dans la musique pour ce disque, j’étais complètement épuisé. Et puisque que ce disque sonne de façon assez “nouvelle” pour un solo Doseone, j’ai pensé qu’essayer quelque chose de différent pour l’artwork était une bonne chose… !



Tu continues de donner des cours de rap, en tant que professeur de freestyle?

Doseone : Les cours ont été supprimés il y a un an, pour cause de manque de fonds. C’était du bénévolat, avec le support de la mairie, mais le tout a été annulé. C’était vraiment mortel. Un jour, on m’a demandé de parler hiphop à des gamins, ce que j’ai fais. Puis ils m’ont dit qu’ils avaient un cours de Freestyle juste après. J’étais sur le cul, du genre “quoi ? un cours de freestyle ? je peux rester pour voir ?” et au final, j’ai commencé à enseigner, et cela pendant 4 ans. On a foutu le feu dans ce cours, les petits étaient dingues, c’était génial.



Qu’est-ce que tes élèves ont pensé de ton dernier disque de Themselves? C’était méchamment Hiphop, mais aussi bien bizarre…

Doseone : Peut être qu’ils pensent… que je suis complètement taré (rires). A dire vrai, je n’ai jamais vraiment demandé… Je pense que pour eux, j’étais un freestyler avant tout. Et pour freestyler, il faut vraiment se lacher, se laisser porter, donc j’ai essayé de leur apprendre ça en premier lieu. Et même si ces cours ne sont plus d’actualité, j’ai acheté une superbe Boombox façon années 80’s, et on va tous régulièrement dans le centre de San Francisco pour freestyler et faire des Cypher dans la rue, c’est vraiment énorme. Parfois on est juste 10 personnes, mais parfois il y a bien 200 personnes qui nous entourent. Il y a beaucoup de Battle, tout le monde veut tenter de me détruire parce que je suis blanc (rires). Mais c’est pas de faire des Battles le plus important, mais c’est vraiment le freestyle, c’est ce que j’aime le plus, clairement.

Tu sais, genre dans une relation amoureuse, dans un couple, on doit parfois vachement communiquer, quand il y a un problème. Mais le rap et moi, on est ensemble jusqu’à la mort. Ces dernières années, tu sais pourquoi j’ai fais pas mal de disque très pop/chant ? Car de l’autre côté je passais mon temps à rapper dans la rue. C’est tout simple. On peut me critiquer comme on veut, on peut me traiter de nul, vieux, bizarre, gay, pop, vendu… appelle moi comme tu veux, j’en ai rien à foutre, car au final je rappe depuis toujours. Il y a pas mal de gens qui ont un problème avec la façon dont je fais du hiphop. Mais entre moi et le hiphop, ya pas de problème, on est ensemble pour la vie. D’ailleurs, tous les rappeurs que j’ai pu rencontrer, qu’ils soient normaux ou super balaises, jeunes, blancs ou noirs, ils le savent, ils captent tous que j’aime ça par-dessus tout.

Le seul problème qu’il m’est impossible d’éviter, c’est : je chante, je rappe, et je le fais depuis 15 ans. Mais les gens ont commencé à m’écouter à des moments diffèrents de ma carrière, et veulent toujours entendre à nouveau ce qu’ils ont écouté de moi en premier. Ceux qui sont tombé sur moi dans ma période hiphop veulent absolument que je rappe à chaque fois. Et ceux qui m’ont écouté chanter veulent que je continue là dedans. Mais au final, c’est ok, car tous les styles que j’ai arpenté pendant ma carrière, je les referais à un moment ou un autre.



Ce n’est pas la première fois que tu viens au Japon non?

Doseone : Non. La première fois, c’était à cause de Dj Krush. Il est tombé amoureux du crew Anticon quand on commençait juste. C’est lui qui nous a fait venir au Japon au départ. A dire vrai, il était dingue de JEL à la base… mais JEL avait toute la famille Anticon à ses basques donc… (rires). Le petit problème est que mon niveau de japonais est pourri, et que Krush n’est pas super fort en anglais, ce qui ne facilitait pas vraiment la communication entre lui et moi. Mais je suis un fan absolu de Dj Krush. Mes premiers raps, c’était sur du Dj Shadow et du Krush… il n’y avait aucun hiphop instrumental dans le style avant ! Avec le groupe The Prunes aussi, des mecs qui ont taffé avec les Beastie Boys. Ces trois beatmakers, c’était vraiment le début de tout pour moi. Donc Krush nous a amené au Japon, et là j’ai rencontré les mecs de Popgroup (ndlr : entourage de Dj Baku) et ces mecs sont devenus des putains d’amis, presque des frères.

Sinon j’adore le Japon. Je pense qu’il y a des trucs un peu chelou quand même, genre, socialement, c’est parfois bizarre… mais clairement les japonais, dans leur vision, leur appréciation du monde, sont les meilleurs. C’est assez difficile à expliquer, mais le reste du monde n’est pas comme le Japon. Et pour un musicien un peu à la marge comme moi, c’est parfait de venir ici parfois ! Pour la musique japonaise, c’est difficile de bien connaître le sujet pour moi, car aux US, on entend très peu parler de productions japonaises. Mais quand je viens dans le pays, j’adore tout ce que j’entends, en live et compagnie. Les mecs semblent avoir la possibilité de vraiment faire et créer ce qu’ils veulent. Genre le groupe qui jouait avant moi ce soir, Ningen Ok, était complètement dingue.




“La musique est dans une époque bizarre, c’est comme de l’eau, les gens la consomment gratuitement, et comme si cela allait toujours être gratuit à partir de maintenant…”



Et que penses-tu de cette nouvelle vague de Hiphop dont tout le monde parle ces temps ci, comme Asap Rocky, Danny Brown, Odd Future ou même Death Grips ?

Doseone : Ben, ce que j’aime vraiment dans cette nouvelle scène, c’est que se sont de jeunes blacks qui ont beaucoup d’originalité. Parceque ça fait un bail que cela n’avait pas été le cas dans le rap. C’est juste que des mecs comme Biggie Smalls ont fait exploser le rap, mais en ne parlant que d’argent et encore d’argent. Et depuis au moins dix putains d’années, le rap ne parle que de fric, et c’est de la merde. Il y a vraiment un manque de personnalité dans les lyrics depuis quelques temps. Quand j’étais jeune, le rap était différent. Je veux dire, tu voulais du rap marrant, du rap porno, du rap violent, du rap joyeux, du horror-core, du rap gangsta… ben il y avait de tout ! Donc voila, ce que j’aime avec ces nouveaux venus, c’est qu’il y a de l’originalité, on dévie enfin des textes parlant que de fric. Bon, pour Asap Rocky, j’ai été un peu déçu ces derniers temps, parce qu’il commence à ne faire des morceaux qu’avec des (il tente d’imiter Asap Rocky, ce qui nous fait bien marrer) “I got a driiiiink, I got moneeeey” façon Soulja Boy, ce qui fait un peu pitié. Même si les prods de Clams Casino cassent la baraque. On va dire que pour Asap, le mec ne fait pas assez d’efforts. Il est cool et tout, mais tu as envie de lui dire “allez, bouge toi le cul putain, casse tout, vas-y à fond” (rires)

Pour Odd Future, c’est diffèrent , car Earl et Tyler sont incroyablement doués et talentueux. S’ils deviennent trop gros trop vite, ils risquent de se cramer définitivement. Mais s’ils mettent la chance de leurs côtés, et si Earl peut continuer dans cette originalité qu’il a depuis le début, sans être dilué par leur popularité, ils risquent d’être des mecs vraiment brillants. En plus, les beats labellisés Odd Future sont souvent un peu pourris, mais putain, le charisme de ces jeunes est absolument incroyable. Tu sais, après avoir enseigné le rap à des gamins de 14 ans, ça me fait vraiment kiffer de voir que le rap fait par des jeunes est de retour. En ce moment, tous ces mecs ont la hype avec eux, ils font des couvertures de magazines alors qu’ils ont juste balancé un EP sur internet, voir parfois juste un morceau… Mais s’ils respectent le Game, ils deviendront grands. Les vrais artistes évoluent, et les acteurs restent à quai. Sinon, pour Death Grips, c’est un peu différent, mais ce groupe est juste génial.



Pourquoi aimes-tu autant les chats?

Doseone : Je ne sais pas vraiment. Ils sont “vrais”, c’est tout.

Tu es déjà allé dans un Cat Café au Japon ? C’est un endroit ou tu peux prendre une bière, comme dans un bar normal, sauf qu’il y a des chats partout.

Doseone (il écarquille littéralement les yeux) : De quoi… ? C’est quoi ce truc de dingue, tu déconnes? C’est où ? Je veux y aller maintenant ! Ou demain, c’est possible demain ? Genre le matin? J’ai un concert l’aprem, mais sinon après c’est quand tu veux. Je ne peux pas croire ce que tu me dis, j’avais jamais entendu parlé de ça, je veux juste vivre dans ce putain d’endroit (rires)



Ok désolé, je sais que tous les musiciens détestent cette question en fin d’interview… mais tu peux conseiller trois disques ou artistes à écouter absolument?

Doseone : Bon, Shabazz Palaces déjà, il faut acheter tous ses disques. Sinon, il y a aussi Seregenti ! C’est mon MC préféré, ce mec m’inspire comme jamais… Et sinon… (longue réflexion). Bon… on va dire… Hey, j’adore Baths. Sa musique est sublime. Si tu n’écoutes pas Baths, t’es qu’un enfoiré (rires). Bon ok, deux des trois artistes cités sont sur Anticon, c’est un peu craignos, mais c’est vraiment ce que j’aime.



Dernière question, j’ai vu sur ton wall facebook que l’on t’avait tenu au courant de la probable fermeture du Grrrnd Zero, cette salle de concert underground mythique à Lyon… tu as un truc à dire pour eux ? Ca reflète quelque chose de la musique actuelle ?

Doseone : Ouai j’ai vu ça ! Et bien, sauvez le Grrrnd Zero ! Pour ceux qui veulent le fermer, ne soyez pas des putes ! Et profitez de ce que vous avez avant que cela disparaisse… C’est un peu comme tous ces disquaires qui ferment, ça me rend triste…

Tu sais que j’ai du trouver un travail cette année ? Parce que je ne faisais plus du tout d’argent avec la musique. J’ai donc un boulot, un taff en entreprise. Et je suis bien obligé de travailler maintenant, car j’ai beaucoup de dettes à cause de ma musique. En plus c’est pas comme si je m’étais acheté des Corvettes et plein de cocaïne hein… C’est juste que je devais payer mon loyer, et que au bout d’un moment, ce n’était plus possible, je ne pouvais plus vivre de ma musique, ça m’a vraiment pris la tête.

Je n’essaie pas d’être misérabiliste pour le coup hein, mais je fais de la musique parceque j’aime ça plus que tout, alors pas le choix. Mais maintenant que j’ai un boulot, je suis comme un gosse à nouveau ! Après le taff le soir, je rentre chez moi et je suis là “putain il faut que je fasse un morceau là maintenant” (rires). Le truc, c’est que pour faire de la musique, tu dois dépenser de l’argent. La musique ne vient pas de nulle part, faire du son comme on le veut, ça coute du fric, il faut que les gens comprennent ça… Mais la musique est dans une époque bizarre, c’est comme de l’eau, les gens la consomment gratuitement, et comme si cela allait toujours être gratuit à partir de maintenant.

J’aime pas parler comme un vieux con, mais je pense que c’est irrespectueux de voler de la musique. Tu sais, un jour, j’ai eu un journaliste devant moi, qui venait pour une interview, et il me dit “mec je possede tes disques” “Whao, c’est super cool, merci !” “j’ai réussi à tout pécho sur le net, et j’en ai même acheté deux”. Donc j’ai fais le calcul dans ma tête, et j’ai dis “ok tu me dois 150 dollars, tu me les files maintenant ou après l’interview ?” (rires). Comment tu veux que je parle de ça sans passer pour un vieux con ? Tu sais, les trucs sur le fait de télécharger illégalement ma musique et tout, ça me foutait vraiment la mort. Si tu vas dans un musée, que tu prends un tableau sous le bras et que tu te barres, c’est la même chose ! Tout le monde te balance “la musique n’a jamais été aussi bonne, il faut absolument qu’on la partage gratuitement”, et moi je désespère façon “please nooooooooooooooo !” (rires).

Alors j’ai laissé tombé, maintenant je fais juste la musique que je veux faire, sans penser au downland et autre partage gratuit, car ça me prenait trop la tête, et c’était une logique impossible à comprendre pour moi. Je pense qu’il n’y a aucune solution à ce problème dans le futur, il faut juste être résilient. Hey, en parlant de chat, tu connais les photos Breading Cats ?? (rires)






Photos : Doseone live (20 avril) à Tokyo + Cat Café (21 avril) :






Doseone – Last Life (G is for Deep)





Doseone interviewed by Dat’ / Chroniques Automatiques


Photos by Dat’ / Chroniques Automatiques


FACEBOOK

Ps : Solidarité Chroniques Automatiques toujours en cours, n’hésitez pas à faire tourner l’interview un maximum !!




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RAOUL SINIER INTERVIEW – French

Posted in INTERVIEWS on January 18th, 2011 by Dat'



“… d’ailleurs, quand on me demande quel style de musique je compose, je suis toujours dans la merde…”





Une interview, parce que Raoul Sinier est quelqu’un qui m’a marqué à vie avec son album Wxfdswxc2, puis continué à sortir bombes sur bombes avec une constance rare (et surtout un rythme plus qu’effréné)… mais surtout car le bonhomme semble proposer un univers complètement flingué et inépuisable, musical et visuel. De clips cradingues (et superbes) en albums tordus, Raoul Sinier roule sa bosse entre radis samouraïs et machines qui hurlent. L’interview fut realisée autour d’un géant plateau de fromage (c’est important) et un peu trop de bières, dans un bar parisien.

A venir, un Ep (Cymbal Rush / Strange Teeth & Black Nails) sur le label Oeuvre, imprimant un virage que l’on sentait deja amorcé sur son précédant disque. La voix de Raoul Sinier est encore plus présente, jusqu’à tenter le saut dans le vide en tapant une cover foutrement maîtrisée du Cymbal Rush de Thom Yorke. Tout ça, en attendant un 5eme album à poser quelque part en 2011, suite logique,  mais poussant le vice encore plus loin en continuant d’incruster le chant de Raoul Sinier, tout en imprimant une continuité au niveau de ses instrues dérouillées et trop dangereuses pour les enceintes.


Où l’on parle du nouvel Ep, d’un brouillage de piste, de musiques noisy ou non, de New Jack Swing, d’Autechre et d’escalopes :




–       Dat’ : Apres tes quatres derniers albums qui étaient bien cramés et expérimentaux, d’où t’es venu cette idée de faire une cover de Thom Yorke ?

Raoul Sinier : Tout est parti du label anglais Oeuvre, qui m’avait contacté pour sortir un disque. Et vu que je n’avais rien en stock à la base, j’avais proposé de remixer des trucs à eux. Mais ils m’avaient envoyé que des morceaux de Hiphop jazzy, ce qui ne cadrait pas vraiment avec ce que je voulais faire. Alors on cherchait des solutions, car quand on vient me chercher pour sortir un truc, je suis évidemment plutôt partant. Tout en sachant que je réserve mes album pour Ad Noiseam. Alors on a pensé à un Ep de collab, des remix and co. Mais au final, ces temps ci je commence à pas mal chanter sur mes morceaux, je fais pleins de reprises et covers pour tenter autre chose. J’avais mis pas mal de ces covers sur internet qui sont sympathiques, mais celle de Thom Yorke je la trouve franchement bien, donc j’ai proposé ça. Agrémenté d’autres morceaux inédits pour l’Ep.

Après ce morceau, ce n’était pas « pour » vendre une cover, mais je trouve ça intéressant de faire une reprise. Ya pas vraiment de cover dans la musique électronique, c’est des remix la majeure partie du temps. D’ailleurs au départ, même le label parlait de remix, j’ai du leur dire « attendez les gars, ce n’est pas un remix, mais une vraie reprise, il n’y a strictement aucun élément du morceau original » c’ets cette démarche de tout recréer qui est intéressante…


–       Dat’ : A l’ecoute de Tremens Industry et de ton Ep (en plus de ces reprises glanées sur le net) ta voix semble vachement plus présente dans ta musique. D’ou vient cette envie de chanter, alors que l’on te connaît pour une électronique clairement noisy ?

Raoul Sinier : Cela vient du morceau The Hole de Tremens Industry, où j’avais commencé à chanter un truc super aigu, pour faire comme mes idoles, Thom Yorke and co, mais rapidement, je me suis rendu compte que je n’étais clairement pas au niveau (rires). Alors bon, sur The Hole, j’ai couplé ça à un max de vocoder et effets, qui rendent d’ailleurs très bien, mais j’ai trouvé ça dommage de ne pas pousser un peu plus le tout de ne pas faire quelque chose de plus brut. En plus, j’ai mine de rien fais 4 albums, 8 disques en tout, je n’aime pas composer toujours la même chose, je veux évidemment faire évoluer ma musique, donc j’ai carrément commencé à prendre des cours de chants ! C’est difficile de trouver une personnalité vocale, mais au moins je peux faire ce que je veux, et ça me permet de faire autre chose, d’autres morceaux. Je ne lache pas du tout l’instrumental, mais faire les deux me plait.


–       Dat’ : Tu ne flippes pas de brouiller les pistes avec ton public d’il y a quelques années ? Il y en a beaucoup qui pensent que mettre du chant dans de l’électro relève d’une espèce de crime de majesté…

Raoul Sinier : En même temps je ne vois pas trop ma musique comme « Electronique » au sens strict. Je ne vois pas la musique comme « électronique ou non électronique ». Ca ne veut pas dire grand chose. Au final ma musique est électronique parce que c’est mon matériel, et que j’ai l’habitude de travailler tout seul, je ne suis pas un super bon instrumentiste non plus… En plus je suis tout le temps sur mon ordi pour mes peintures et mes clips, donc l’ordi, c’est mon outil, qui fait de la musique, donc électronique, voila.

Bon après, je vais dire un truc cliché, mais le concept de genre musical n’existe pas, ne m’intéresse pas. La musique, pour moi, ce n’est pas des distinctions de genre, mais des distinctions d’états, de sentiments : Tu as de la musique triste ou gaie, compliqué ou simple, candide ou sombre… Je classe tout comme ça, dans mon itunes, il ya tout est n’importe quoi. Même un album de Gerard Depardieu tiens ! Que j’ai samplé sur mon premier album d’ailleurs (rires) enfin, je ne suis pas ultra fan non plus hein, c’est plus pour l’exemple ! (rires)


– Dat’ : Et niveau réception / critiques ?

Bah, de toute façon, à chaque album, je perds un peu de mon ancien public donc, ça ne va pas changer. (rires) Quand j’ai sorti Brain Kitchen, il y a plein de gens qui ont lâché le train car ils pensaient l’album trop complexe, trop abrupt et violent. Et quand je suis revenu avec des choses plus calmes avec Tremens Industry, il y a eu encore des déçus, qui voulaient que des trucs ultra déstructures et chaotiques… Donc si on anticipe ou l’on fait gaffe aux “attentes”, on ne s’en sort pas (rires)



“…pour mes clips, certes ils sont dérangeants, mais j’espère que l’on voit aussi le coté un peu décalé des choses…”


–       Dat’ : Justement malgré le maelstrom de tes compos, ultra crade, il y a souvent quelque chose d’épique, d’ultra mélodique. C’est important pour toi de travailler là dessus ?

Raoul Sinier : Moi ce qui me plait en temps qu’auditeur, c’est la musique qui me prend aux trippes, et m’entraine vers le fond. Emotion et compagnie. Comme je disais, le genre musical, on s’en fout, tant que cela te prend au trippes.
Bon après attention, je travaille beaucoup la forme aussi hein, la production, mais c’est toujours pour servir le fond. (Je lance “Stone Pills”) Oui voilà ce passage est un bon exemple, j’ai bossé à fond l’environnement sonore, mais c’est pour servir la mélodie derrière…

Pour parler plus large, on peut prendre aussi Autechre. Attention je ne fais aucune comparaison avec moi hein, c’est juste pour l’exemple ! Autechre, ils ont une production de folie, c’est ultra technique, impressionnant. Et quand ils mettent ça au service de l’émotion, c’est vraiment puissant. Mais à d’autres moments ce n’est que de la technique pure, et là ils me font vraiment chier. Les mecs quand ils te parlent de Autechre, ils parlent que de technique, de logiciels, de maxmsp and co, mais merde on s’en fout, moi je ne suis pas ingé son (rires) ! je veux juste écouter un truc qui me frappe, avec de l’émotion.


–       Dat’ : Ca t’embête cette comparaison entre toi et Autechre, qui revient souvent ?

Raoul Sinier : Non c’est souvent à cause rythmiques fracassées. J’avais fais une cover de Gantz Graf aussi. Autechre, ce sont des purs compositeurs. Mais le truc fatiguant, c’est qu’ils peuvent te sortir n’importe quoi, tout le monde va trouver ça génial. // Tu les a vu en live ? ça t’écrase à terre// non je ne les ais pas vu, mais j’en ai entendu parlé, et ça a l’air vraiment cool, car justement, ils proposent un vrai truc en live. Parce que les concerts de musique électroniques ce n’est pas dingue dans la majorité hein.  J’imagine que c’est parce que la marge d’improvisation est souvent faible.
Meme des mecs connus, ce n’est pas la panacée parfois. Genre Squarepusher, avec son Do You Know Squarepusher. L’EP est génial, mais le disque live, ça m’aurait fais chier d’aller voir ça, on dirait qu’il lache ses morceaux tel quels, avec juste un écho en plus ! En plus le mec te passe son disque en live, puis le ressort en disque ! (rires)// Oui c’etait le problème avec Hudson Mohawke je me souviens, il presse play et il fout un powerpoint Keyboard cat derri…// Hey, j’ai le teeshirt Keyboard cat d’ailleurs !!(rires)

Tiens en parlant de comparaison, il y en a une qui revient énormément aussi, c’est avec Prefuse73 Ca par contre, ça m’embête un peu plus. Juste parce que tous les deux, on utilise des samples charcutés. Hop, tu fais de la musique avec des voix hachées, c’est forcément du Prefuse73. Alors que cette démarche dans ma musique, pour moi, elle vient de groupes comme Digital Underground.
La seule constante de Prefuse73, c’est que ses nouveaux albums sont les mêmes que ceux d’avant mais en moins bien. (rires) En plus les premiers étaient plutôt bons. Après, c’est une référence pratique pour les journalistes. Ca,  Aphex Twin, ou Autechre… Des outils pour parler musique electro. J’ai lu sur des chroniques parlant de mes disques “on tient notre Aphex Twin français” ce qui est évidemment flatteur, mais nos musiques n’ont rien à voir. D’ailleurs cette phrase on la voit dans 1 article sur 3, à chaque fois que l’on voit une chronique sur un disque français affilié electro. Sur mon 1er disque, c’était l’avalanche de comparaison avec Prefuse73. Ce mec doit être le gars le plus cité dans la presse, niveau référence. Limite on parle plus de lui pour le comparer aux autres que pour ses propres disques, ça doit être déprimant (rires) Et pour le coup, quitte à écouter ce genre de musique, autant écouter MachineDrum, qui fait des trucs géniaux depuis le début des années 90. //merci tu me fais un super lien avec l’interview de Grems ahah// Oui, ils ont fait des concerts ensemble je crois, c’est une bonne idée, Machinedrum est top.


–       Pour revenir sur le son, ils viennent d’où tes premiers amours noisy ?

Je ne sais pas du tout. Ce n’est pas par rapport à des idoles, références ou autres. C’est juste une histoire de sensibilité je pense. J’adore le fait d’avoir une musique super violente qui sert une composition plus fragile, ou belle, ça met en valeur cette dernière. En plus, le son de la distorsion, je trouve ça très beau, c’est presque physique. Genre le dernier morceau de Tremens Industry qui est franchement porté là dessus. Donc voilà, c’est vraiment subjectif, je ne peux pas l’expliquer. Je n’ai jamais vraiment écouté de noise, ou des morceaux Shoegaze bien massifs.

Je n’ai pas vraiment le profil d’un connaisseur sérieux de musique d’ailleurs. Quand j’étais jeune, j’écoutais surtout des conneries, des choses “normales” de l’époque, genre Dire Strait, U2. Bon, je n’étais pas à fond non plus hein. Mais voilà, j’étais très Rock, et après pendant mes études de dessins j’ai rencontré des gens qui écoutaient que du Hiphop. Je ne connaissais pas du tout, ces mecs m’ont fait écouté Public Enemy, je suis devenu fou avec ça. C’était au tout début des années 90, car je ne suis plus un jeunot (rires) En parallèle, j’avais découvert le New Jack Swing aussi, Teddy Riley, tout ces trucs là, et j’ai vraiment adoré ça. Alors que bon, sincèrement, la plupart, c’est de la super merde (rires). Maintenant, j’écoute encore évidemment Public Enemy, mais le New Jack Swing, c’est juste pour me remémorer mes jeunes années, ou faire chier les autres (rires) J’adore A Tribe Called Quest aussi, intestable. Lord Finesse, Digital Underground. Cette époque d’âge d’or du Rap, c’était un peu la belle vie pour ces mecs aussi, à griller les samples comme ça. (rires)


–       J’ai l’impression que sous la noise de tes morceaux, il y a un humour toujours un peu présent, avec tes samples (comme celui de julie pietri) tes clips ou dessins. C’est important de pas sonner trop sérieux ?

Ah, oui vraiment. Ma musique est noire, mais moi je ne le suis pas. Je n’ai pas envie de cultiver le coté sombre juste pour le coté sombre. C’et un peu comme l’humour noir en fait. Même dans les morceaux les plus sombres, j’aime bien mettre un truc débile. Pour Julie Pietri, c’était parce que c’était esthétique. Mais pour le reste, caser des titres bizarres, des références à la con comme expliqué out à l’heure ou des samples de South Park. Même pour mes clips, certes ils sont dérangeants, mais j’espère que l’on voit aussi le coté un peu décalé des choses. J’aime bien prendre des trucs atroces pour en faire des choses marrantes. Pour Huge Radish Samourai, s’il y avait des humains dans le clip, cela serait horrible, alors j’intègre un radis mignon dedans, ou moi, courant avec un filet ridicule. Cette dualité, c’est ce qui me plait aussi.


–       Voir tes vidéos sur Nolife ou Canal+, ça a changé quoi ?

Pour Canal +, c’était juste une poignée de diffusion, même si c’était génial. C’est surtout NoLife qui m’a aidé, c’était incroyable, et beaucoup de gens me contactent en me disant qu’ils m’ont découvert sur Nolife. Et c’est bien, car cette chaine, ce n’est clairement pas le cœur de cible de ma musique à la base, vu qu’ils passent beaucoup de trucs japonais. Jpop and co, et pourtant, cela plait quand même. Ca me rassure, les gens sont ouverts, n’ont pas peur d’aller vers des trucs un peu plus décalés. Beaucoup de ceux qui m’ont contacté ni connaissaient vraiment rien en musique électro, ou n’en écoutaient jamais, mais accrochent quand même à fond sur ma musique. C’est une des plus belles récompenses ça !



“…le jour où j’aurai la capacité de faire des clips avec des robots Transformers géants qui se battent dans la rue et tout, je le ferai. Mais pour le moment je ne peux pas, donc je fais des escalopes…. !”


–       J’avais posé la question à Grems il y a quelque temps : comment se passe le taff dans le graphisme ces temps ci ? tu fais comment pour rester présent ?

Ben écoute, je fais des expos, un peu, mais ce n’est pas la folie. Le processus est lent. On essaie de m’imposer dans l’art contemporain, et pourquoi pas, mais je me heurte au coté, digital de mon travail. Tout ce que je fais, c’est grâce à mon ordinateur. La reproduction se démocratise, mais ce n’est pas encore ça, utiliser l’ordinateur dans l’art ne semble pas encore assez « légitime ».

Sinon, pour rester présent, je pense que Grems a choisi la bonne solution : il fait des expos, il sort des bouquins, il fait des trucs un peu partout, et surtout il gère son bizness tout seul… L’art contemporain, la Fiac tout ça, ce n’est pas vraiment un monde pour moi. Grems fait beaucoup de produits dérivés, de Tee-shirts, Swatch and co, ça aide énormément aussi. Moi je fais deux ou trois Tee-shirt, mais c’est le système à la demande, tout le monde peut faire ça. Même si ce système va se développer je pense. Pas forcément simplement pour les Tee-shirts, mais aussi pour les livres and co, édités à l’unité, ou par dizaine. Cela va démocratiser un peu le tout, je ne sais pas si c’est la meilleure méthode mais bon, ça peut aider.


–       D’ou vient l’inspi pour créer tes créatures. Tu fais vivre des objets du quotidien ?

(réfléchît pas mal de temps…) Je ne sais pas comment l’expliquer ça, sincèrement. //genre tu cuisines une escalope, et hop tu as l’idée de faire un clip ? // Non, pour ça, il faut surtout que je compose avec ce que je sais bien faire. Me limiter à ce que je sais dessiner. Le jour où j’aurai la capacité de faire des clips avec des robots Transformers géants qui se battent dans la rue et tout, je le ferai. Mais pour le moment je ne peux pas, donc je fais des escalopes (rires). Pour parler froidement, l’escalope, c’est un personnage qui n’a ni bras ni jambes, pas de visage, donc pour moi, créer ça, c’est facile. Comme pour le Radis d’ailleurs. Et en plus j’ai appris tout ça en autodidacte, tout seul. Je m’aperçois 5 ans plus tard qu’il ya des méthodes pour faire ce que j’ai fais en 5 secondes, alors que cela me prenait des heures (rires) Je deviens dingue, mais j’apprends seul. Donc c’est une grande partie de ce qui génère ce que je fais, je ne veux pas aller plus loin que ce que je sais faire. Le jour où je vais pouvoir faire un visage en 3d, avec des animations de dingue, on le verra. Mais pour le moment, ça serait franchement cheap et moche, donc je ne le fais pas.

Apres, pour toutes ces créatures, je ne peux pas l’expliquer, mais j’adore l’idée de toutes ces petites créatures rigolotes qui courent partout. Le radis avec ses deux jambes, c’est marrant, mais je le place dans quelque chose de très sombre au final, le pitch est d’une noirceur incroyable, mais au final c’est rigolo aussi… Comme pour l’escalope dans Tremens Industry, c’est un des clips dont je suis le plus fier, parce qu’il y a plein de choses à dire dessus, sur la folie, l’aliénation, l’image des autres and co, et c’est d’ailleurs mon niveau de lecture. Mais il y aussi le niveau de lecture rigolot, avec ce truc mignon qui bouge, « hey regarde ce mec il traine une escalope dans la rue au bout d’un fil ». Les gens peuvent prendre ma vidéo au sérieux ou au contraire d’une façon marrante, il n’y a pas de problème, je fais ça aussi pour cela !


Raoul Sinier – Tremens Industry (et son escalope donc)



–       Tu es déjà allé au japon je crois. Tu en retiens quoi ?

J’étais complètement dingue en allant là bas. C’etait pour un échange école, j’étais resté 15 jours sur place. Bon on avait quelques visites et compagnie, mais la plupart du temps, on était libre, j’avais adoré. En plus j’étais à fond sur les jeux vidéos à l’époque. Et avant, ils sortaient ultra en avance au Japon, par rapport aux sorties européennes. J’achetais Street Fighter II sur super Nintendo à import à 700 balles je crois, sur Paris. A un ou deux jeux par mois en import à ce prix là, tu imagines… je n’ai jamais compris comment je faisais à l’époque pour avoir autant de jeux, vu que j’étais trop jeune pour avoir de l’argent (rires) Donc au Japon j’avais pu me ramener des tonnes de jeux pour que dalle.

Bon sinon c’était surtout la ville, tous ces paradoxes, ces immeubles délirants et au milieu une petite bicoque, c’est génial, super niveau inspiration. Ca semble sans fond, comme si on ne pouvait jamais s’arrêter de découvrir des choses. Le folklore est tout le temps là aussi, mais c’est noyé dans un bordel moderne génial, comme la demoiselle en Kimono avec le portable de fou accrochée dessus. C’est quand même plus classe que nos costumes à nous (rires).


–       Entre tes machines qui hurlent et tous les monstres qui vivent chez toi, Tes voisins, ils vont comment ?

Ben écoutes, mes voisins ne savent pas ce qui se passe, je suis un voisin normal (rires) en plus je travaille chez moi, c’est souvent la journée, donc pas de soucis. Apres je comprends que c’est tentant de dire “chez lui ça doit être le merdier”, mais non pas du tout, mon appart est à peu près normal (rires) Tiens ça me rappelle, y avait un gars que j’avais rencontré il y a pas mal de temps, qui connaissait mon travail et m’avait dit vachement étonné “hey mais c’est génial, en fait tu es super gentil et souriant”, je lui avais répondu “évidemment, ça va, c’est pas parce que t’es comique à la tv que tu fais rire tout le monde au resto aussi” (rires)

C’est un peu dommage, car dès que tu fais quelque chose d’assez sombre, dans la tête des gens, tu dois forcément être tout blanc, tout déprimé. Au contraire, si j’étais comme ça, il me faudrait faire de la musique joyeuse. Après, on a tous ses doutes et ses faiblesses, quand je suis anxieux, je suis un mec super anxieux d’ailleurs, je ne peux rien faire de créatif. Au contraire c’est quand j’ai la patate que je compose mes morceaux les plus tristes et ceux qui ont le potentiel de te trainer le plus vers le fond.


–       Toi qui fait des covers tout le temps, tu ne voudrais pas faire un cover des Flight Of The Conchords ?

Ah j’adore cette série, c’est vraiment dommage qu’elle s’arrête ! Après pour une cover, je ne sais pas, musicalement ce n’est vraiment pas mon répertoire. Sauf le morceau Inner City Pressure, qui est incroyable (rires) Donc musicalement, pas franchement. Par contre les deux saisons de cette série, je les connais par cœur, j’ai même des expressions que j’utilise dans mon quotidien maintenant (rires)


–       Dernière question qui fait chier tout le monde mais que je pose tout le temps… Quelles sont tes influences ?? // Non… // Comment vous vous êtes rencontré ? //Non…// Est-ce que c’est l’album de la maturité (rires) ? //Non mais celle là il faudrait que je la pose un de ces jours… (rires) !! Donc oui, non, cite moi 3cd à conseiller, que tu aimes vraiment, vieux ou nouveau. Sans être trop corporate.

Ah la vache, pour moi c’est difficile cette question. Sans réfléchir trois plombes, le deuxième album de Redman ( Dare iz a darkside…), égalité avec le premier Wu Tang. Je ne comprends pas comment ils ont fait pour devenir ce qu’ils sont maintenant, mais à l’époque c’était incroyable. Ce Redman est vraiment génial aussi.

Apres… (Hésite longtemps) alors l’album Gumbo Millenium de 24-7Spyz. C’est un album de Rock Fusion, mais delà grosse époque fusion, genre Fishbone and co. Tiens j’aurais du dire Fishbone aussi (rires) Ce cd passe du hard rock au reggae ou métal, noise, r’n’b et soul sans faire exercice de style. Bon après le groupe a mal tourné, car le chanteur s’est cassé, et ils ont commencé à faire du métal banal. J’étais à la limite de faire une reprise de ce disque d’ailleurs, mais le chanteur est tellement hallucinant que j’ai laissé tombé (rires) Bon pour finir, évidemment, Radiohead. Pas tout, mais à partir du moment où ils ont commencé à être bizarre.


– C’est marrant, tu ne cites pas un disque électronique ?

Oui, parce que la musique électronique ne me parle pas tant que ça. Enfin c’est le terme « musique électronique » qui ne me parle pas. Le grand point fort de la musique électronique, c’est que c’est un genre qui ne désigne pas une musique, mais une technique de production. La musique électronique est partout et nulle part en fait. C’est surement le seul style comme ça. Genre du Reggae, tu pourras faire un truc qu’avec des ordi, ça restera du reggae. Alors que « musique électronique » ça ne défini qu’une technique de production, donc ça regroupe autant des morceaux à la Squarepusher avec un niveau de composition incroyable et compliqué, limite musique classique, et à coté un truc tout pourri fait en trois secondes. Pour moi c’est le seul style musical, avec ce terme qui te dit « ben on ne peux pas te définir, c’est juste que c’est fait avec des ordinateurs ». Alors que moi ce n’est pas l’ordinateur, mais la musique qui en sort qui m’intéresse.

D’ailleurs quand on me demande quel style de musique je compose, je suis toujours dans la merde (rires)






Raoul Sinier – Strange Teeth & Black Nails





Raoul Sinier – The Hole






Raoul Sinier – Wonderful Bastard









Raoul Sinier interviewed by Dat’ / Chroniques Automatiques

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GREMS INTERVIEW 08/2010 French

Posted in INTERVIEWS on September 8th, 2010 by Dat'


…et progressivement je me suis dit : “mais merde, pourquoi il n’y a pas de rap là dessus ?” Alors j’ai tenté de faire ça…





Eté, c’est synonyme de vacances, mais surtout de retour au bercail, du moins pour quelques jours. Et vu que Paris, autour du 15 aout, ce n’est pas franchement l’endroit le plus folichon pour faire la bringue, on tente de rentabiliser le voyages entre deux averses ( !!!) et trois raids onéreux dans le rayon disque de Gibert St Michel. Pendant ces pérégrinations parisiennes c’est l’occasion d’avoir pu rencontrer Grems à coté de Jussieu, bien entouré de ses amis et producteurs, et quelques semaines après la sortie de son énorme nouvel album, Broka Billy, disque protéiforme, off limits et halluciné. Le tout dans une crêperie chelou avec un Supermicro bien cool, causant, tatoué et toujours entre deux pays. (Il faisait une pause entre Barcelone et Bucarest je crois, ou Londres, ou NYC, et pleins d’autres trajets qui font gagner des Miles).


Grems en interview donc, où l’on parle de Broka Billy, de Detroit, de dance, de traumatismes, d’échange, de gros projets, de jetons à semer et de talons aiguilles :




– Dat’ : Bon, comment s’est passé cette sortie de Broka Billy ? comme Sea Sex and Grems, on a l’impression que tout a été fait par toi même, assez confidentiellement, hors des circuits de distribs normaux…

Grems : Et bien non justement, ce n’est pas vraiment un réseau hors circuit. Ok, pour Sea, Sex Grems, c’était la galère mais c’était fait exprès. Il ne devait pas sortir en fait. J’étais content de l’album, mais au moment où il est partir à l’usine il s’est passé un événement personnel vraiment mauvais, donc au final je me foutais du disque, je me foutais de tout. Alors bon, je l’ai sortir à 700 ex et 300 packs, et c’est tout. On pouvait l’acheter sur Lazydog & JustLikeHiphop.com, point barre. Pour Broka Billy ce n’est pas pareil du tout. En plus des autres, c’est Fnac, Virgin, mais ce n’est pas dans le rayon musique. Les vendeurs ne connaissent pas foncièrement, mais tu peux le commander un peu partout.

Et franchement c’est cool, car l’album est bien parti pour le moment, on a pu contrer le téléchargement pendant 3 semaines. Apres c’est un peu parti en couille mais bon on ne peut plus éviter ça. Et ça semble bien parti sur la durée. C’est sorti juste avant l’été, on a foutu un peu le bordel niveau promo, là c’est un peu calme l’été, mais on va refoutre la pression dès Septembre, avec nouveaux clips, expos et tout…


Dat’ : Je me trompe peut être, mais on a l’impression que tu as complètement craqué sur cet album, que tu as vraiment voulu tailler un LP sans te poser de limites ou de carcan, quitte à partir en vrille. Pour moi c’est cette liberté qui porte l’album…

Grems : Ah c’est sur, ça fait pas partie d’une trilogie, c’est pas Rouge à lèvres non plus ! Apres je n’ai pas voulu choquer, ou réellement partir en couille. J’ai juste voulu faire quelque chose de qualité, qui me plait. Vu que je connais bien comment composer des prods et instrues, c’est plus facile. Même si ce n’est pas moi qui les ait fait, on a travaillé à fond en osmose avec tout le monde, on a fait ça à la pro. Pas suivre une tendance, ni devancer. Juste être dans un autre monde. C’est même pas tenter prendre de l’avance ou autre, c’est juste faire un truc unique. Et bizarrement, ce nouvel album est hyper chelou, mais il passe mieux que les autres dans la tête des gens !


– Dat’ : Il s’est passé quoi avec Troubl et son coup de génie sur La Barbe ? J’ai l’impression que c’est ton truc le plus “Detroit”, une des prods les plus abouties qui m’a été donné d’entendre… Et en même temps, pourquoi stopper le tout après 1min ?

Grems : Ah c’est du Deepkho ça. Ce genre de Prod, c’est quand je casse les couilles à Troubl, et il pond un truc de fou comme ça. C’est 2 ans de taff et de réflexion derrière ce morceau. Je voulais résumer les trois albums d’avant, plus Rouge à lèvres. Pour l’arrêt brutal, et bien moi j’ai la suite du morceau (rires). Mais j’aime ce couplet, j’aime le fait que cela n’aille pas plus loin, genre juste pour commencer, prends ta claque. Faut que l’intro démonte, que tu comprennes direct.


Dat’ : Bon, on peut aimer ou non ton album, mais Rencontre avec un Ballon remporte tous les suffrages. Je l’ai même fait écouter à des potes japs qui sont tous devenus fous, alors qu’ils ne pigent rien aux paroles. Le délire vient d’ou ?

Grems : C’est l’idée d’une copine (il montre une amie) c’est elle qui dit “les ballons / c’est stressant” héhé. Le texte, ce n’est pas péjoratif avec les nanas, mais l’histoire d’une fille qui viole un mec. C’est parti de cette idée. Apres j’ai l’habitude de voir ce qu’ont kiffé les gens. En général, le public retient chez moi Casse moi le cul et Merdeuse, ce qui est marrant vu que c’est les deux morceaux que j’avais fais de A à Z. Là avec Klimaax qui a fait la prod, on s’est renvoyé la balle à fond, j’ai fais l’esquisse, et il a défoncé le morceau. En plus il avait la pression, car sur l’album a coté, il y avait Simbad et Son Of Kick. D’ailleurs pour Klimaax, son remix de Dimanche est complètement ouf. Cette version, ce morceau, il me traumatise. Klimaax, il connaît parfaitement la musique, il comprend direct dans quel sens tu veux aller.


– Justement des mecs comme SonOfKick ou Opolopo, qui semblent bien éloignés du Hiphop à la base… Pourtant il y a une vraie osmose entre vous, comment se sont organisées les collabs ?

Ben Opolopo, pour moi, c’est le plus grand producteur Broken. De l’avoir sur mon album, c’était improbable. Qu’il s’intéresse à un rappeur français, c’est dingue. Et le truc le plus improbable, c’est qu’il a fait le morceau le plus improbable de sa carrière (rires) Il a pas fait du Opolopo à 100%, il a fait un truc hybride de folie.

Pour SonOfKick, c’est Simbad qui me la présenté. J’écoute Simbad 100 fois par jours, il m’a présenté ce type, qui habite à Londres depuis un bail, et ces deux là faisaient du rap il y a ultra longtemps, donc ils connaissent bien la discipline. En plus c’est un Sound Designer, donc au niveau du mix, ça arrache. Et au final, on est devenu super pote. On a un groupe Son Of Kick / Grems, qui s’apelle Mika Miki, où l’on fait les prods à deux, on rap à deux, on fait tout à deux de A à Z. Et c’est génial, parce que c’est vraiment devenu mon pote. Il sait tout faire, des morceaux hybrides vraiment riches, genre Carlos, qui est vraiment genre “Broka-à-la-SonOfKick”

Et alors attention, gros truc qui sort d’ici noël : c’est enfin le Disiz & Grems, produit entièrement par Simbad et SonOfKick. Il est fini, enregistré, il y 18 tracks en boite, et ça va être fou. Je précise, ce n’est pas une redite Roule à Levres. Il y aura des prods super Deep, d’autres super rap, du 2-step, du dubstep, du Broken. On voulait aller dans tous les sens, on s’est vraiment éclaté. On voulait le faire depuis longtemps, là on avait un moment de liberté, on s’est tous retrouvé à Londres, et on a fait ça dans les règles.



“Nous on est des potos, on va faire de la zic en mode potos…”


– Il a démarré quand cet amour pour la techno de Detroit ? si tu devais décrire ce que qui te fascine dans un morceau du genre?

La Chaleur. La chaleur mec. En fait, ça vient de début 2000.J’ai toujours aimé les trucs bizarres, genre dance deep à la Crystal Waters. …ahah on se retrouve là dessus, c’est pas souvent que j’entends ça… Ouai. Mais petit à petit, je me suis renseigné pour aller plus loin. Vraiment les trucs bien Deep hein, et je me suis rendu compte que Technotronic, c’est déjà du Deekho en fait. Apres j’écoutais évidemment à mort la Beat Generation, Jay Dee, le Pete Rock, des trucs qui m’ont blessé à vie. Et un jour je suis tombé sur une compil 3cd Master At Work, avec pleins de classiques Deep dedans, et je me suis dis, “putain c’est completement dingue ça”.
Mais j’étais attiré, par des trucs plus sale, plus crade. Et j’ai commencé à découvrir la tech de Detroit. Avec Moodymann, Theo Parrish, Omar S, avec des tracks super spéciales, juste une machine dégueulasse, des beats dégueulasses, tout est dégueulasse, mais Deep à fond (rires).
Donc je suis tombé la dedans, mais surtout Moodymann. Le mec m’a autant possédé que Jay Dee. Pour moi ces deux mecs, c’est la même démarche, le même esprit, mais en House pour Moody. Et progressivement je me suis dit “mais merde, pourquoi il n’y a pas de rap là dessus ?” Alors j’ai tenté de faire ça, le premier comme ça c’était Merdeuse,, j’ai commencé à assumer le truc, à la fin de mon premier album. Puis je suis passé par Metro Area, puis sur le Broken, j’ai fais ma culture tout seul, avec des potes qui m’ont filé pas mal de sons. Mais toujours Deep, toujours chaud. Pas les trucs à la française électroniques bien froids. Apres en France, je suis le seul à le faire mais il y en a quelque uns qui le font dans le monde, genre Capitol A.


– J‘ai dépoussiéré mon Cd SourceLab il y a peu, avec toue cette vague de la première French Touch, De Crecy, La Funk Mob et compagnie. tu cites beaucoup Detroit, amis des gars comme De Crecy et son Motorbass, La Funk Mob, voir Mr Oizo, ça ta pas un peu inspiré aussi ?

Ben des trucs à la Crydamoure c’est un peu ça. Les vieux genre De Crecy and co, c’est chanmé aussi, mais ça j’ai pas vraiment écouté, ni été inspiré par ça. Apres Daft Punk c’est très bien mais bon… Il y a Mr Oizo qui est cool ouai, qui est bien hybride aussi, il est clairement à part. Donc franchement, moi c’est vraiment le Broken et la Deep quoi. Les trucs vénères, plein d’espaces, avec tous les éléments bien placés, avec de la mélodie…


Aligner les mots en rafale, des phrases en diagonales, des rimes à l’envers ou sur 3 syllabes. C’est parti d’où cette façon de rapper ?

Ouai, en Trisyllabique ! Et bien j’ai écouté pleins de rappeurs, culture rap normale. Il y a pas mal de cain-ri qui rappent comme ça. Genre Busta Rhymes qui m’a traumatisé avec son Flow, ou Wild Child, donc j’ai eu envie de faire ça. Cette manière d’être rapide, de retomber, de tout malaxer. Et de pas se limiter à une syllabe à la française. Ca, ça ne marche pas, sauf si tu es un parolier incroyable avec une plume géniale. Ou alors si tu es Mr fou comme Le Jouage, qui arrive, sans faire de rimes, à avoir un flow de dingue. Incroyable ça (rires)


– Pour les anglais ou jap, qui ne comprennent pas tes paroles… Des mecs qui ne connaissent pas foncièrement le Hiphop français, et qui entendent la France surtout par le prisme électronique actuel… pour eux, tu décrirais ta musique comment ?

(…) Dire tout haut ce que pas mal penses tout bas. Sans aucun tabou. Sur du Broka. La musique que l’on a inventée. Teinté de Deep House de détroit.


– Ya pas mal de Uk garage sur ton album non ?

Mmm non pas tant que ça, c’est du Broken beat quoi. Le Broken c’est du Uk, le Uk c’est du broken. Au final, le seul vrai truc 2step sur le disque, c’est le dernier titre de l’album. Apres c’est hybride comme je disais. Idée française, taff Uk, mélange de tout. Je ne veux pas que cela sonne ceci ou cela, je veux que ça sonne Musique. Genre j’écoute James Blake, ça me rend fou, ça me révolutionne. Il est tellement moderne dans sa musique. J’ai envie de ça dans la mienne.
Ce Broka, je l’ai vraiment fait à la cool, et au final, il est en train de baiser l’album Air Max dans la tête des gens. Il est plus cohérent, plus construit. C’est compliqué quand tu fais un album, y’a genre 35 morceaux, au final il t’en faut 17, c’est chaud a choisir. Il faut que il y a un petit Fil rouge une histoire.
D’ailleurs je n’étais pas d’accord dans ta chronique, sur le fait que t’accroche moins sur J’essaye. Pour moi, le mix de ce morceau est dingue. On dirait du Madlib qui fait du Broken, les flow sont fous, l’ambiance est dingue.


– En déconnant un peu je disais dans la chro qu’un des défauts de Broka, c’est de ne pas avoir Iris dessus, car tu es un des rares mecs qui pose avec lui… Tu as des news sur ses projets ?

Ah t’aime bien Iris ? c’est cool ! Et bien, tu vas kiffer, il va y avoir une compile DeepRo de fou, ça va être complètement improbable. On prend des prods Deepkho, on prend tout le rap français, et on le met dans un shaker. Triptik, James Delleck, Baste, 3010, Jouage, Ntek, Gourmets… tout le monde, mais en faisant des combinaisons de fou. Ça donne des morceaux bien marrants, assez invraisemblables.
Ca va sortir de partout dans notre famille là. Le set & Match qui sort, Ntek qui fini son album aussi, j’en fais la pochette, les projets exposés tout à l’heure, ça va être une fin d’année chargé.


– Ca va sortir sur quoi maintenant, je n’ai pas trop compris ce qui s’est passé avec Deephop ?

Ca va sortir sur Usle ou DeepRo. Barf, ya pas de label, on verra bien, les gens se la pètent avec des labels qui servent à rien. Nous on est des potos, on va faire de la zic en mode potos. On a une marque, on va faire des éditions, avec des tee-shirts and co, et après on les foutra sur nos plateformes à nous. Comme la compile de folie là, il va y avoir une édition avec le teeshirt, et après on va la filer en rafale.



“Même dans le rap, je trouve ça marrant, les mecs sont tous street, looké Hiphop, alors moi je kiff vraiment avoir cette image mélangée street et un peu punk gothique bizarre…”


– Pour rebondir sur ton autre activité, Le taff dans le design c’est vraiment niqué comme dans la musique ces temps ci, ou ça va ?

Ahah mais tout est niqué mec (rires) tout est niqué de toute façon, les temps changent.
Bon, il y a eu une grosse période chelou cette année, un peu calme, mais en même temps j’ai fais deux livres, ça fait parti du délire. Mais pour le design, il faut se rendre indispensable, il faut semer tes jetons à mort. Comme pour un taff normal, où tu balances tes Cv partout. Là cette année, c’était tendu, mais j’ai semé, taffé gratos un peu partout, et là ça revient, car j’étais au final bien présent visuellement. Apres dans une activité pareille, c’est normal qu’il y ait des périodes fluctuantes. Mais j’ai pris le risque de ne pas avoir d’agent, c’est moi, c’est Grems, personne d’autre. Ca a ses avantages aussi.


– Justement, dans cette idée de semer ton boulot, il y a eu le teeshirt de la Star ac, la rumeur pour Secret Story. Comment tu vois ces placements de produits improbables ?

Pour le Teeshirt à la star Ac, c’était super frais. En plus c’était le plus connard de tous qui le portait. C’était fou, pour la Star Ac, TF1 censuraient toutes les marques sur les fringues, mais à chaque interview du type, c’était écrit en gros Grems sur l’écran, ils avaient du oublier ça, c’était parfait (rires)
En fait c’est ce que je te disais, je sème à fond, et un moment ou un autre, ça porte ses fruits. Attends, il y avait même le ministre de la culture, Miterrand, qui avait ma montre sur la couv’ de L’express quoi ! Dans tous les kiosques. On la voyait à mort, dans tous les sens. Et en plus ils en parlent dans le journal, en disant “ouai il vient avec cette montre inspirée matisse pour provoquer Sarkozy et ses Rolex” (tout le monde se marre) C’est génial d’infiltrer les medias comme ça. Il y avait aussi les gamins de Stéphanie de Monaco, dans les journaux peoples, qui avaient mes Swatchs, bien mises en évidence aussi. Les gens collectionnent les montres de cette marque, donc ça a bien tourné ! (Couverture de l’Express vs Grems ici)


– Tu continues à graffer dans la rue ?

Ahah ouai j’ai fais que ça cet été ! J’ai fais 30 jours 30 graffs.


– Londres / Paris / Tokyo. Dans l’ordre, ces 3 villes t’évoquent quoi ?

Londres : Ca défonce
Paris : c’est de la merde
Tokyo, ça déchire, il faut que j’y aille, faut que je fasse des expos là bas putain. Mais ça va venir. Déjà là, le bouquin tourne bien. Et Opolopo est connu là bas donc j’espère que la musique va tourner. Je ne sais pas comment faire pour y aller jouer, mais si je fais un concert, crois moi, cela sera un bordel de ouf. (rires) Ou des expos pourquoi pas. Mais c’est vraiment chaud de faire des liens, du réseau là bas. Il y a moyen, il faut juste que le Broka se propage. Il part bien, en France évidemment, mais ça se répand aussi ailleurs, avec tous les producteurs, leurs réseaux, des dj qui relayent, tiens il y a même Starkey qui passe nos trucs. Ah, il y a un gros potentiel avec le Broka billy remix par Machinedrum aussi !! ce mec ne rigole pas (rires)
Apres pourquoi Paris c’est de la merde ? ben sérieusement, regarde autour de toi. (Il n’y a rien autour de la place, et personne à l’horizon, tout est fermé, à part le troquet où nous somme attablés) …Oui justement un truc m’a étonné, c’est qu’en Aout, à Paris, on a l’impression qu’il n’y a rien. La majorité des clubs sont fermés, très peu de concerts, c’est étonnant…
Mais ouai mec, ya rien à paris. Ya que des gens qui se plaignent ! Dans tous les autres pays, en Aout c’est le bordel dans tous les sens. Et le pire, c’est que si tu tentes un truc, tout le monde va te dire que c’est de la merde. On ne s’intéresse à rien.
Le pire c’est qu’on est des balaises en France, on a du vraiment du Level, mais on est pas des champions de l‘ouverture. Niveau musique, ce n’est pas dingue en ce moment, le paysage français.


– Un autre truc où je me retrouve, elle vient d’ou cette fascination pour les gothiques, les Punk, les talons aiguilles vs tatouages ?

Ben, je crois que je suis Punk dans ma tête. Je crois que je suis un hybride entre le Rap, la Techno détroit et le Punk Gothique (rires). Pour ce dernier, c’est pas forcément pour la musique, mais pour les fringues, les attitudes, je trouve ça génial, j’aime trop les meufs comme ça, je trouve ça incroyable. A Tokyo il y en a partout non ? …ah oui, c’est sur que de ce coté là, c’est bonheur… Ah enfoiré (rires) Ca m’a inspiré pas mal de morceaux cheloux aussi…
Les Gothiques, j’adore ce morceau, ça me tenait vraiment à cœur, c’est que de l’amour dans cette track, rien d’autre. Il y a des mecs, ils m’ont dit “Ouai c’est pour te moquer des goths” je leurs réponds “mais ta gueule putain écoute les paroles” (rires). Si j’aime ça, c’est peut être que c’est parce que j’ai 5 origines différentes, ou que je voyage pas mal, je ne sais pas…. mais j’aime vraiment ces trucs. Même dans le rap, je trouve ça marrant, les mecs sont tous street, looké Hiphop, alors moi je kiff vraiment avoir cette image mélangée street et un peu punk gothique bizarre
…D’ailleurs, le nouveau clip de SonOfKick, c’est un clip completement dans ce delire, et hop, c’est toi qui lui ouvre la porte dans la video… !
Ouai ce clip, c’est une idée de mon pote Micka, et la demoiselle dedans c’est ma tatoueuse. On met à la patte, on se rend service, échange de bons procédés. Partage, tout est là. Genre avoir un remix de quelqu’un gratuitement, ça défonce. j’ai une chance d’être designer. Donc j’ai un autre truc à faire valoir, tu peux faire des collabs de ouf, et des trucs extrêmement intéressants… Tu fais un Design par ci, une collab par là, on échange, on communique !


– T’as fais quoi Dimanche dernier ?

(rires) On fait souvent des clips le Dimanche. Non, là je suis rentré de Barcelone.


– Question que je pose obligatoirement : Trois disques à conseiller aux lecteurs. Qu’ils soient vieux, pas connus, nouveaux ou mainstream. Juste en évitant d’être trop corporate.

Mmm c’est chaud… Personne peut m’aider là ?

Ben James Blake déjà comme je dis souvent, son nouvel Ep, dingue. Le dernier Moodymann aussi. Parce que là, “c’est imbattable”… Ah, en Rap, un truc que les japonais connaissent bien ! Maspyke ! C’est signé sur Jazzy Sports, le Stone Throw japonais. Un groupe américain signé là bas. Qui fait du rap old school, mais bien actuel. Maspyke, très bon gout, quand on aime le Hiphop bien crade, avec du souffle et des beats crades. Ca donne envie de réécouter du rap…






La Barbe By Grems Prod Troubl. from grems miki on Vimeo.




Grems – Rencontre avec un ballon
envoyé par neopen. –





Grems interviewed by Dat’ / Chroniques Automatiques

English saviour is Darren_w / Japanese Translation by the amazing Kumi Kimura

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Lightning Bolt – Interview 15/11/2009

Posted in INTERVIEWS on November 21st, 2009 by Dat'

Lightning Bolt : Interview 15/11/2009

Une interview mal préparée donne toujours… (2)

Avoir eu l’occasion d’assister à un live de Lightning Bolt, c’est déjà cool. Sur cette tournée japonaise (Sold out sur sa quasi-totalité ! ), et ce concert en particulier Dimanche dernière, le duo New-Yorkais nous a servi une recette qui participe largement à l’aura du groupe. Ces fameux lives guérillas, à même la foule, avec un Brian Gibson, impassible, qui torture sa basse à l’infini, et Brian Chippendale, le batteur fou, autant occupé à matraquer ses futs qu’à repousser la foule qui lui tombe dessus. Un live de Lightning Bolt, c’est être assuré de se retrouver au milieu d’une mare humaine prête à en découdre. Ca tombait bien, ce soir là, on a vu, dans le desordre : Des gens voler, un mec rebondissant partout en saignant du nez, des coups de coude, un gars à moitié à poil sauter partout, de la sueur, des paires de jambes toucher le plafond de la salle (si si). Au milieu, Lightning Bolt, qui envoie la sauce comme jamais, un bordel de folie, qui nous transforme en zombie, qui transporte, tabasse, dérouille. Essayer de proteger son appareil photo. Prendre son pied, se fondre dans un magma cathartique ayant peu d’équivalent.

Sinon avant Lightning Bolt, il y avait DMBQ, un groupe japonais assez énorme que je ne connaissais pas. Qui envoyait méchamment, sorte de Rock alien protéiforme. Avec un chanteur se foutant subitement un masque à gaz pour amplifier son micro, qui se met à cracher sur le public ou qui s’accroche aux projecteurs du plafond. Aussi, un guitariste qui attaquait les gens avec des objets sympathiques. J’ai reçu un glaçon en pleine arcade sourcilière, elle ne s’est pas ouverte, une bien bonne nouvelle. Ah oui, et un surtout batteur qui joue de la batterie sur le public. Pas DANS le public hein… SUR le public. Dessus quoi. Heureusement, j’ai pris des photos, à voir en fin d’article, sinon comment croire un truc pareil. Je vais vite creuser du coté de leurs disques.

Et hop, j’ai tout à coup l’occasion d’interviewer Lightning Bolt (Brian Chippendale, le batteur, vraiment marrant, même après plus d’une heure de folie), sans avoir de questions préparées à l’avance, et alors que l’on est encore en train de se remettre de la bourrasque balancée par les deux New-yorkais pendant plus d’une heure.

Donc a l’instar de la rencontre avec Antipop Consortium l’année dernière, c’est fait à l’arrache, alors faut improviser et je rage après coup en pensant à toutes les questions oubliées. (Sur le travail graphique de Brian Chip par ex). Pas grave, on fera mieux la prochaine fois.


Lightning Bolt Live 15/11/2009

“Its all about survival”

– Dat’ : Vous avez eu des problèmes il y a 3 ans, lors de votre précédant passage au Japon ?

Brian Chippendale : Oui, on a eu un problème de Visa. Enfin, officiellement, c’était juste un problème de Visa. On est arrivé à l’aeroport, il y avait tous les détails dans des dossiers, tout ce que nous avions fait au niveau du groupe, et ce que nous allions faire au japon. Ils nous attendaient à l’arrivé de l’avion, et au final, on a du repartir aux Usa sans poser les pieds à Tokyo. On suspecte le fait que quelqu’un ait appelé le bureau d’immigration avant que nous arrivions, pour nous foutre des bâtons dans les roues, mais on n’a jamais vraiment su qui et pourquoi…

– Tourner au Japon finalement, ça se passe comment, comparé à d’autres pays ?

BC : On a fait 10 dates déjà, c’est vraiment fun. Bon, il y a une chose que je n’aime vraiment pas, c’est que les gens semblent fumer dix fois trop, et c’est difficile, je ne suis habitué à nager dans la fumée. Ca te tue quand tu veux chanter…

Par contre, les gens aux Japon sont vraiment incroyables, super amicaux et réceptifs. Enthousiasme énorme, toujours enclin à t’aider et à discuter sans arrières pensées, les spectateurs nous aident même à charger/décharger notre matos !

Ah, et la bouffe au Japon est affolante (rires)

– Lightning Bolt est bien connu pour jouer directement au milieu du public, à même les spectateurs, sans barrières. Comment gérez la foule et ses aléas, quelle ne vous écrase pas ?

BC : Je pense que c’est de la chance, tout simplement. Juste de la chance. Bon, encore une fois, au Japon, les gens ont un espèce de savoir-vivre, ils arrivent à se contrôler, à devenir dingue sans dépasser certaines limites. Mais au final, ce soir, quelqu’un est littéralement tombé sur ma batterie donc bon… Mais je crois que c’etait un étranger justement (rires).

Apres c’est les gens bourrés qui sont compliqués à gérer. Par exemple hier soir, j’ai frappé quelqu’un trois fois avec mes baguettes sans faire gaffe, le mec n’arretait pas de tomber sur la batterie au moment où je tapais dessus, donc j’ai du lui blesser la main, le poigner. Enfin, ça fait varier les rythmes (rires)

– Justement, d’ou vient cette idée de jouer au milieu de la foule. Ou tous ces lives dans des Parkings, sous des ponts, en face de la salle de concert ou le concert est prévu… ?

BC : Difficile à dire. On a commencé à faire des lives à même la foule il y a des années. Au départ, on était sur la scène, la haut, à jouer devant 10 personnes maximum qui nous regardaient bizarrement. On s’est dit, “qu’est ce que l’on fout là haut ?” et on a décidé de descendre de la scene. On va dire qu’au début, personne ne venait nous voir en live, il n’y avait que 3 personnes, donc ça allait, ce n’etait pas trop dangereux (rires)

Maintenant, les lives tournent bizarrement parfois, ça devient difficile. Je me suis ouverts le doigt durant un concert cette semaine, parce que les spectateurs étaient trop proches, collés à la batterie, et ils n’arrêtaient pas de faire bouger cette dernière, ça m’a blessé sans que je m’en rende compte.

Faire des lives de la sorte, c’est assez intimidant en fait. A chaque fois, la seconde avant de commencer, on prend une grosse respiration, et Brian et moi, on se dit “Il faut y aller”. C’est comme aller au combat, à un pugilat. Mais on veut vraiment garder cette configuration en live. “Its all about Survival”.

Bon, récemment, on a du rejouer sur scène, on n’a pas le choix quand on est programmé dans un très grand festival, c’est diffèrent d’une petite salle. Le feeling est vraiment different, une sorte d’adrénaline en moins, mais c’est étrange, parfois Lightning Bolt sonne plus sauvage et barré quand on joue sur scène, car on n’a pas à s’inquiéter des instruments qui bougent, des gens qui te tombent dessus, d’une foule qui risque de t’écrabouiller. On peut vraiment se lâcher.

– Vous pensez quoi de la scène underground japonaise ? Je veux dire, Lightning Bolt fait parti des cercles des “fucked-up bands”, et justement, au Japon, il y en a beaucoup…

BC : Il y a énormément de bons groupes au japon. Beaucoup plus de “fucked-up bands” que dans les autres pays, tous concentrés sur un espace pas si grand. Et beaucoup défoncent, et méritent vraiment le coup d’oeil. DMBQ est un groupe fou, assez incroyable. Guitar Wolf est vraiment détraqué comme groupe aussi, dans un genre plus rock. Zero Reality, avec qui on a joué, sont fous, groupe de Noise rock Free Jazz fracassé. On a joué avec Masonna aussi, à Osaka, durant cete tournée ! Ce mec est affolant. Je l’ai vu pour la première fois vers la fin des 90 aux USA, durant le Merzbow / Masonna tour, et c’est un des trucs les plus dingue qu’il m’a été donné de voir…

– Tu as fais le 77Boadrum, projet dirigé par les Boredoms, c’était comment ? (77 batteurs en spirale jouent en même temps)

BC : Ouai, c’était un rêve des Boredoms, ils avaient bien préparé leur coup. C’est vraiment énorme. J’étais un peu méfiant quand on m’a parlé de ce projet, j’avais peur que cela soit du genre une version géante du “on s’assoit ensemble et on tappe sur des bongos” mais en fait c’était génial, complètement fou. La spirale des batteurs, le temps parfait, le couché de soleil pile à la fin, qui donnait directement sur le New York Bridge.

– Pour parler un peu de votre dernier album, Earthly Delights : en France, dans les chroniques comme les impressions, le morceau Colossus revient vachement souvent, tout le monde semble l’apprecier. Pourtant ce morceau a un son plus “Heavy” que d’habitude, et il est un peu plus accessible que les autres morceaux. C’était l’objectif ?

BC : Les gens aiment vraiment Colossus ? Vous êtes bizarre en France (rires) Tous les fans des Melvins crient “Yeah Colossus !” ? C’est cool ça… On ne veut pas réellement prendre cette direction, c’est juste arrivé, sans vraiment le prévoir. On fait énormément de sessions en impro, et un jour, Brian Gibson est arrivé avec ce Riff, qui sonnait mortel, donc on l’a gardé, c’est tout. On ne réfléchie vraiment pas à une direction à prendre, on s’assoit juste dans un coin et on fait du son sans aucun plan ni projet préalable. On enregistre un peu partout d’ailleurs, en tournée, dans les hôtels, on improvise à fond, et on construit des morceaux apres, avec des bases trouvées comme ça.


Lightning bolt – Earthly Delights

– Vous pensez que vous allez un jour vouloir tendre vers des morceaux ou des projets plus calculés ?

BC : Non pas vraiment. On pense pas à des schémas pré-établis avant de créer un morceau, genre “Bon, faut que l’on soit archi-violent sur ce morceau !” ou “Hey, on devrait rajouter un orchestre !” (rires)

A la rigueur, pour nos prochains morceaux, j’aimerai bien que notre musique tende vers un truc plus minimal, juste pour essayer. Enlever les trucs superflus, construire des trucs plus directs. Mais vraiment c’est une idée comme ça, pas d’itinéraire ni planification. Et évidemment toujours garder le duo Basse/Batterie, pas de projet d’expansion de ce coté là non plus.

– Bon parlons un peu electro. Ton jeu de batterie est au final pas si éloigné d’un style de rythme que l’on retrouve dans la Drill’n bass, ou autres genre escarpés. D’ailleurs pas mal de gens qui aiment cette frange de la musique électronique aiment Lightning Bolt. C’est un truc que tu écoutes ?

BC : Ben en fait je n’écoute pas énormément cette frange de la musique electro, même si j’apprécie pas mal. J’avais un ami qui en écoutait beaucoup, des trucs bien barrés, donc je lui en ai piqué pas mal, sans même connaître les noms.

Apres pour mes rythmes, je ne sais pas, bien souvent ils viennent d’eux même. J’ai ce besoin inhérent de faire accélérer les choses, ce qui change parfois radicalement le morceau que l’on joue. Genre, sur certaines ébauchent de morceau, je suis supposé jouer plus lentement, mais au final, je pars en vrille et je vais trop vite, ce qui fait que je dois hacher et tailler les rythmes pour les caller… Ce qui ressemblent finalement à ce qui peut se faire en electro.

– Venetian Snares devrait t’engager pour faire ses rythmes en live…

BC : Ouai, et je jouerai juste des lents “boum boum boum” pour désorienter tout le monde (rires)

– Tu n’as pas peur du Carpal Tunnel Syndrome ou autre, à jouer comme un dingue de la batterie ?

BC : Non ça va, pour l’instant mes bras sont encore ok… J’espère qu’ils tiendront encore quelques années (rires)

– Et ton projet solo, Black Pus ? Un vrai album est sorti en 2008…

BC : On a sorti une nouvelle galette il y a peu ! Bon c’est plus un single, mais il y a tous les trucs les plus dingues que je peux faire avec ma batterie et les drums. Black Pus est clairement different de Lightning Bolt. C’est construit plus sur les voix, et avec des Synthés, drums… Juste essayer de prendre son pied, vitesse maximale et tout s’autoriser.

(Des mecs gueulent, ils veulent vider la salle, il faut degager)

– Bon ok, dernière question, deux trois disques à conseiller pour les lecteurs Français qui vont tomber sur cette interview ? Que l’on devrait connaître ?

BC : mmm, il y a ce groupe, Indian Jewelry, ils viennent du Texas. Le nom est bien trouvé, en fait, quand tu conduis travers les Usa, tu vois des tonnes de “Indian Jewelry Stands” le long des routes. Le nouveau cd de ce groupe est vraiment bon ! C’est un peu comme Jesus and Mary Chains, une pop rock bien noisy, bien bizarre. J’aime beaucoup Leonard Cohen aussi, son troisième album, qui avait que 8 titres dedans, vraiment beau, j’ai oublié le nom (Songs About Love And Hate ) J’écoute beaucoup de trucs vraiment différents du son Lightning Bolt en fait…

Ah oui ! il faut vraiment écouter les sorties du label Sublime Frequencies, qui édite des trucs magnifiques complètement barrés, vraiment bizarres, et totalement inconnus à la base. Celui sur les musiques venant de Sumatra est incroyable !! (Radio Sumatra : The Indonesian Fm expérience / Sublime Frequencies)

Photos :

DMBQ Live 15/11/2009 :


Oui vraiment.

Lightning Bolt Live 15/11/2009 :


Une paire de jambes se cache dans cette photo

Lightning Bolt lives Videos :

( Impossible de prendre des videos durant ce carnage, donc on glane quelques vidéos prises sur youtube, qui reflètent toujours bien un Live de L Bolt. Perso, je ne me lasserai jamais de regarder la premiere…)


Lightning Bolt live Hallowen Show


Lightning Bolt live Paris, Vilette Sonique May 2009

Thanks to Cecile & JN

Dat’


Antipop Consortium – Interview 09/05/2008

Posted in Chroniques, INTERVIEWS on June 15th, 2008 by Dat'


Antipop Consortium : Interview 09/05/2008


Une interview mal préparée donne toujours …









L’interview sera disponible sur Krinein.com en début de semaine d’une façon plus “propre”, serieuse et concise.











Où l’on parle du nouvel album, de l’importance des potes, de “push the music forward“, du mélange electro hiphop, de la langue Française et de cerveaux connectés sous un parapluie. Avec M.Sayyid, High Priest, E.blaize et Mad Man…







Dat’ : Bon tout le monde attend réellement l’album, le net s’est enflammé à l’annonce de votre reformation, façon Jesus revenait sur terre (j’en faisais parti). Quelle est la direction de ce nouveau disque ? Plus electro, plus Hiphop ?


M.Sayyid : La direction, c’est “Infinite, Infinite, INFINITE ! ”

High Priest : Nous ne faisons pas de séparation entre la musique électronique et le hip-hop. On utilise ce que l’on veut utiliser, on fait ce que l’on veut faire, quel qu’en soit la matière. Pour le prochain album, on va juste continuer à développer et enrichir la direction que nous avions instaurée et tenue avant. Mais en même temps, on a une approche plus individuelle (Projets solos) de notre musique, que l’on ne changera pas.




Dat’ : Pourquoi un nouveau disque après tant d’années de séparation ?

High Priest : On est arrivé à un point ou l’on apprécie de nouveau de travailler ensemble, de compter sur les autres, d’avoir ses potes autour de soi. C’est le point de départ de ce nouveau projet, et notre principale motivation : S’apprécier mutuellement, musicalement comme amicalement.





Dat’ : Apres votre Arrhythmia, vous aviez besoin de projets solo, d’aller un peu chacun de votre coté?

M.Sayyid : Oui, exactement. Personnellement je ne regrette pas une seule second ce que l’on a fait. On devait aller chacun de notre coté pour quelques temps. Ca nous a montré que l’on ressentait un manque entre nous, et entre ce que l’on faisait ensemble. Mais plus important, je veux vraiment remercier tout ceux qui ont supporté ce que l’on a fait en marge d’Antipop Consortium, comme avec Airborn Audio et les autres projets en solo. On va garder tout ça en mouvement et en vie, c’est pas fini de ce coté là aussi. Mais Antipop Consortium est définitivement la priorité, comme cela a toujours été. Fluorescent Black, c’est le nom du prochain album, et il a une putain de gueule.




Tsugi : C’est la première fois que vous venez en France ?

M.Sayyid : Non, nous sommes allé à Lyon plusieurs fois, et depuis 99, on va pas mal en France. On a un bon lien avec ce pays, pas mal d’amis, c’est toujours un plaisir de revenir et de bourlinguer avec nos connaissances.



Tsugi : Quelques mots en français ? je sais que vous tentez d’apprendre la langue…

M.Sayyid : Enchanté ? (rires) Merci beaucoup. Un. Deux. Trois…

E.Blaize : …Catorce ?

M.Sayyid : Nooooooo ! ( Eclats de rire, avec un High Priest qui se met à chambrer dur) C’est tout en fait, mais je maîtriserai mieux le français la prochaine fois, là c’est le début.

(Gros bordel en anglais, on tente de les relancer sur le futur disque)


M.Sayyid : Vous savez, c’est une super période pour nous de se remettre à la musique, en groupe. Personnellement, niveau composition, et E.Blaize dans la production, on est réellement passé au niveau supérieur. Toutes les choses que nous faisons en studio sont “out of control”. Le fun, le plaisir et le bonheur que l’on a d’être de nouveau ensemble, vous allez pourvoir l’entendre clairement. C’est vraiment énorme, plein de lyrics perchés, d’harmonies et surtout plein d’expérimentations qui vont vous pousser à gueuler des “WHAT THE FUCK ?”





Dat’ : Justement, tout le monde attend des ?What the fuck?. A chaque fois que l’on écoute les disques d’APC pour la première fois, il y a des morceaux-what-the-fuck, comme “Mega”…

M.Sayyid : Ouai c’est exactement ça. Mais vous savez, même pour la musique en France, on a pu voir ce phénomène. Dans la “French music” en 1999, il y avait beaucoup de boucles et de Breaks Jazzy. Quand on est revenu ici, petit à petit des gens ont commencé à aimer ce que l’on faisait. Puis ces derniers grandissent, et s’acclimatent de plus en plus avec la musique électronique. Maintenant, des tas de groupes sont dans le mouvement électro. Mais nous clairement, on a toujours gardé notre ligne directrice.





Dat’ : De même, quand vous aviez vendu votre dernier disque, Arrhytmia, ce dernier était encore pas mal expérimental pour bon nombre de personnes. Beaucoup de gens parlent de APC maintenant, ou depuis deux ou trois ans, mais c’était plutôt compliqué avant… vous pensez que votre musique etait trop “futuriste” ?

High Priest : mmm pas vraiment. Quand on regarde la musique, ou l’art en général, on distingue deux sortes de personnes : Les traditionnels, et ceux qui tentent de briser les limites. Push the envelop forward. Nous sommes une bonne fusion des deux. Le Hip-hop est notre base, nos fondations, mais on essaie de le fondre dans les nouvelles technologies. Regarder le passé, mais ne pas s’y embourber, et toujours tenter d’innover. Cela a toujours été notre façon de procéder. Sur notre prochain disque, on n’essaie pas de combattre quelque chose, de se mettre en marge d’un mouvement. Juste repousser les limites. Just push it forward





Dat’ : Et pour vous, c’est quoi la musique du futur?

M.Sayyid : On a kidnappé E.Blaize, notre producteur, pour la tournée. Il est responsable de tout ce que vous entendez depuis le début. C’est LE mec, il tient les clefs, il est le futur, donc on doit bien s’occuper de lui (rires)

E.Blaize : Le futur de la music, ça a toujours était la Fusion. Juste fusionner des éléments qui existent deja, et créer quelque chose de nouveau avec, qui pourrait être apprécié par tout le monde





Je-ne-sais-plus : Vous jouez souvent dans ce genre de festivals, plutôt électroniques?

M.Sayyid : Ca depend du contexte, de comment notre musique est perçue selon les endroits. C’est vrai que l’on joue généralement dans des festivals électro.


Tsugi : Parfois dans des Festival plus Hip-hop ?

M.Sayyid : Oui oui, ça varie vraiment. On est en tournée avec Public Enemy aussi. La musique est en forme ces temps ci. Tout le monde a maintenant les moyens de faire sa propre musique, et de pouvoir être écouté plus facilement. C’est vraiment une révolution pour la musique. Je ne suis pas du tout dans le mouvement démoralisé qui dit que la musique est dans la merde, sur la vente de disque and co… C’est un fait avéré, c’est sur, mais la musique vivra toujours, même en marge du marché et des tendances. Et beaucoup de choses cool sortent encore de ça. Madonna vient de balancer des trucs compléments fous, et je suis un grand fan de Lupe Fiasco, de DataRock… (uh ? le groupe Norvegien ?!?)





Tsugi : Vous avez de nouvelles influences aussi? De nouveaux groupes, qui pourraient vous avoir influencés sur ces dernières années ?

– Dat’ : …et qui aurait peut être changé votre musique d’une façon plus personnelle ?



M.Sayyid : Ouai bien sur, des mecs comme Pharell ou autres sont énormes. Mais, personnellement, j’ai toujours voulu être un musicien. J’ai passé énormément de temps derrière une MPC ou à écrire des textes, maintenant je suis bien, je peux prendre des décisions sans regarder en arrière. Mais le plus important, c’est d’être un membre du Consortium. Parcequ’à chaque fois que je veux partager une idée tous les gars se disent qu’il faut tenter de travailler dessus, de voir comment les choses vont évoluer avec. C’est ça qui est cool dans APC, on a toujours un retour positif sur des idées. Même si elles ne marchent pas, tout le monde a planché dessus.

High Priest : Juste pour compléter : pour tous les membres, ce que l’on a fait en solo n’était pas en réaction à l’explosion de APC. Le Consortium a toujours été construit, élaboré comme si nous étions tous connecté en réseau, tous sous le même parapluie. Un collectif qui débarque avec une vision unique et homogène. Et pour “Fluorescent Black” qui débarque au début de l’année prochaine, on a remis ce système en marche.

M.Sayyid : Hey, je la retiens celle là…





Dat’ : Vous avez des surprises pour les Lives à venir, concernant le nouveau disque?

M.Sayyid : Beans n’est pas là aujourd’hui, donc on va réadapter les morceaux, et balancer quelques nouvelles pistes ce soir. Beans est absent car malheureusement, il est à des funérailles. Mais on voulait quand même être présent. Rassurez vous, on n’a pas dégagé Beans du groupe (rires)





Dat’ : Et juste pour finir, est-ce que vous avez un ou deux groupes à conseiller pour les français qui vont tomber sur l’interview ?

M.Sayyid : Il y a trop de noms à balancer. Mais je soutiens totallement ce que fait Sole. Personnellement j’écoute plus des vieux trucs ces temps ci, comme DEVO. Vous connaissez ? J’en dis pas plus, parce que pleins de groupes vont me dire “hey tu nous as pas cité, tu nous as pas cité” (rires). Donc je vais dire Devo. And definitively, Check for Sole







Antipop Consortium Videos



















Et puisque Beans était absent, on va lui laisser la parole le temps d’un morceau en solo :




Beans – Papercut






Dat’











Kaly Live Dub – Interview 25 Avril 2008

Posted in INTERVIEWS on April 25th, 2008 by Dat'

Une quinzaine de jours après la sortie du nouvel album de Kaly Live Dub, « fragments », et à l’aube d’une tournée de quelques  mois, Stéphane « Uzul », le machiniste du groupe, et Thibault, aux claviers, ont accepté de répondre à quelques questions.  L’occasion de parler Dub, improvisations, Truffaz, films HK et rythmiques vrillées.



Dat’: Alors cette sortie de «Fragments», le 7 avril 08, elle a été ressentie comment?

Thibault : Ben en fait c’était une journée comme les autres (rires).

Stéphane : On n’a pas encore trop réalisé le fait qu’il soit sorti. La tournée n’est pas encore entamée. L’effet “sortie” du disque n’est donc pas encore amorcé. Mais avec les 3 ou 4 dates que l’on va faire par semaine, ça va parler de l’album. On s’en rendra un peu plus compte.

Thibault : Après quand tu parlais de ressenti par rapport à l’album, on a pas mal mâté les commentaires sur Deezer.com, Myspace, et généralement c’est assez positif. On nous dit que c’est plus sombre, mais les gens sont assez enthousiastes, il y a un ressenti sur une certaine fracture avec ce que l’on faisait avant.

Stéphane : Bon en plus, Thibault, au clavier, est arrivé sur le dernier disque, Répercussions. Même s’il s’est rapidement intégré humainement parlant, pour le coup il est clairement rentré dans le groupe, il y a quelque chose de plus que sur Repercussions, d’un point de vu “osmose musicale”. Plus de maturité, la digestion d’une nouvelle formation de groupe. Surtout qu’il gère le tout d’un point de vu mélodique, et que cela influe beaucoup dans une “petite” formation comme la nôtre. On a aussi digéré pleins de nouveaux styles de musique.

Thibault  : En gros, on pourra plus facilement répondre à cette question dans six mois…


Quelle est l’idée principale à imprimer sur le disque? vous aviez une cible précise quand vous avez commencé à aborder sa création?

Thibault  : La façon de travailler a influencé l’album. On a pas mal travaillé en ateliers, avec des morceaux qui ont été créé en groupe, mais aussi juste à deux ou trois. Des idées principales naissent, mais elles n’étaient pas réellement dirigées, c’était plus à l’envie, au ressenti.

Stéphane : Par contre il y avait des choses que l’on ne voulait PAS faire. On ne voulait pas retomber dans les stéréotypes de Kaly. C’est assez facile de partir dans un dub, et de rentrer dans un cercle où tu reproduis certains détails d’une façon inconsciente. On a essayé de coupler les éléments autrement, de les allier, les construire d’une façon différente. Changer un peu sans tout bousculer. Je me suis carrément calmé sur les samples Ethniques aussi. Il y en a beaucoup moins. Ca teinte excellemment bien la musique, mais il faut parfois changer un peu.


Petit retour sur le début de la formation avec votre premier album, Electric Kool Aid alien étonnant dans la masse de disques dub qui commençaient à pulluler. Pas mal de monde avaient été étonné par la structure du premier disque, avec un gros quart d’heure de musique en ouverture, un changement de style parfois prononcé entre les morceaux…

Kaly Live DubStéphane : Le coup des 12 minutes de musique pour ouvrir l’album, c’était volontaire. Le producteur qui a sorti notre album, nous a même dit « écoutez les gars, le coup des 12 minutes, c’est chaud à sortir là » (rires). On partage une idée de la musique que pouvaient avoir des groupes comme Pink Floyd : des morceaux méritent de durer 10 ou 15 minutes, car il y a des éléments super bien, qui doivent prendre leur temps. Pour ce morceau là, j’avais créé une intro au sample, et au final je me retrouvais avec les guidons enfoncés sur le clavier, à balancer tous les sons ensemble… Tu n’as pas envie de stopper le déroulement. Après, un premier disque, c’est une vraie digestion de choses qui s’étalent sur cinq ans, depuis la création d’un groupe. Les autres albums, c’est plus sur une période resserrée de deux ans, donc forcément plus efficace. Mais on avait déjà développé ce que Kaly appelle des morceaux  “à tiroirs”, structure que l’on a toujours voulu garder. Plaquer 4 lignes de basses différentes, pour que le mec qui écoute le morceau se prenne le tout dans la gueule, soit toujours surpris.


Même chose pour le deuxième album, là ou le dub commençait à tourner électro, ou commençait à flirter avec le Rock, Hydrophonic était étonnamment « Dub », presque simple, loin des grand huit de High Tone and co. C’est important cette base Dub toujours bien présent ?

Stéphane : C’est vraiment notre guitariste qui est à fond dans le Dub roots, à la Jamaïcaine, notamment avec son Soundsystem Dub Addict. Résultat : il y a quand même des attachements forts avec cette musique. Notre bassiste aussi aime beaucoup les musiques affiliées au dub, même rythmiquement. Quand tu écoutes du Trip hop au final, c’est assez proche du dub, dans les basses, dans le tempo.

Thibault : C’est vraiment ancré dans chacun de nous, ce Dub Roots, c’est la base au final, tout cela part du reggae.  Même si il y a eu pas mal de changement en évoluant dans notre musique.


Stéphane, Le projet Uzul Prod, avec un des membres de Picore, c’était un besoin de s’affranchir un peu du groupe de faire autre chose ? De pousser le coup du sample ethnique à fond ?

Stéphane : A la base, le projet Uzul prod, c’était vraiment quand j’étais chez moi, la journée finie, à prendre du plaisir devant mes machines. Apres les teintes, j’adore vraiment les samples ethnique, et Uzul prod, c’était le moyen pour moi d’en mettre beaucoup, et d’arriver à des mélanges hyper précis, hyper mélodiques.


C’est vrai que Uzul prod au final, c’est presque du “fan service” pour ceux qui aiment le dub électro pour ses teintes ethniques, cette musique World écrasée par l’électronique !

Stéphane : La suite d’Uzul, c’est un nouveau cd en préparation, toujours ethnique, mais avec une musique plus rampante et lourde que dans Kaly. Je le vois dans ma tête avec des énormes distorsions. Des choses super fortes, je joue sur le granulaire plus que l’organique, je veux que cela fasse vibrer le corps. Avec Kaly, on est quand même plus doux, plus calme.


Et la rencontre avec Erik Truffaz ? Elle a influencé un peu ce nouveau disque ?

Thibault : On avait préparé des compos, dans l’idée de travailler avec Truffaz. Et lui il est venu à la fin, il s’est posé dessus. A l’ancienne, presque comme un Jam. En Live, c’est principalement de l’improvisation, avec un thème précis pour encadrer le tout. Pour la progression harmonique en live, personnellement, j’étais en freestyle total, l’aventure quoi (rires) ! Il fallait suivre Truffaz, se rattraper alors qu’il te sort des accords sortis de nulle part. On n’avait pas l’habitude de faire ça. Indirectement, cela nous a ouvert un peu. Cela se ressent sur Sample’s Squall, un peu plus jazzy, presque Amon tobin. A la base, il y avait une rythmique assez basique, qui s’est transformée en jouant, en testant. Truffaz nous a un peu décoincé de ce coté là.

Stéphane : Il y a aussi l’idée de faire la place, de l’espace dans la musique. Quand on se
produisait avec lui, on lançait une partie et lui son solo, et tant qu’il ne reculait pas dans le noir, qu’il ne baissait pas sa trompette, on continuait à jouer. Perso j’envoyais des effets pendant deux heures, des petits samples, la totale. Et quand tu penses que cela se termine, tu le regardes, et hop, il repart pour un tour. Dans Kaly, à la base, on est plus précis, on partait moins en vrille comme ça, il n’y avait pas beaucoup d’impro.

Thibault : On a quelques morceaux sur le disque qui permettent justement ça en live.


Histoire de repartir sur le nouveau disque, quelque chose est réellement marquant, c’est cette notion d’espace, d’immensité sur les morceaux. On a l’impression d’être dans un Hall avec 300 enceintes autour de nous.

Stéphane : ça c’est Fred ! On a fait appelle à Fred Norguet, le producteur deFragments. Il a mixé pour Ez3kielLofofora… Il a de la bouteille, et une grosse maîtrise là-dessus.


Il y a deux morceaux étonnants sur ce disques, qui détonnent avec ce que l’on avait pu entendre de vous jusqu’à lors : Le superbe morceau façon pop-postrock Magnetic Dust et le Breakcore ahurissant de Ravmone.exe

Sebastien : on l’a fait tous les deux Magnetic Dust ! En fait, comme dit précédemment, on a fait des ateliers, et pour le coup, là on était tous les deux.

Thibault : Pour Ravmone.exe, on aime bien ces trucs là. Je suis un grand fan de Venetian Snares ou Squarepusher.

Stéphane : Matthieu, notre batteur, il aime beaucoup aussi, il en fait depuis dix ans sur son ordinateur, à découper des bouts de batteries. Son père lui a appris avec un Atari à faire de la programmation de son. Il adore faire des “frisées de batterie”. Parfois Paul qui fait du reggae aime ça aussi, avec des samples, des saturations. Ils aiment bien les structures et les sons tout décalés.

Paul (en passant): C’est du Breakbeat !

Thibault : C’est vrai qu’on est plus Breakbeat que Drum’n Bass. On a toujours aimé ça, donc ça transparaît un peu dans notre musique.


Et comment procédez-vous sur la recherche de sample, élément à part entière de votre musique ?

Stéphane : Pour moi dans la recherche, il y a un peu plus de restrictions avec le temps qui passe, vu que l’on a voulu freiner le coté ethnique. Moi j’adore ça, j’achète pleins de vinyles aux puces, j’en récupère à droite à gauche. J’aime bien les retourner, foutre des distos dessus, les transformer. Apres, les samples c’est souvent un coup de bol, on tombe sur le bon un peu par hasard. Sinon j’ai pris pas mal de films étrangers, des bouts de dialogues. Je travaille beaucoup avec les vidéos, les samples de films. C’est un peu plus crade, un peu plus brut avec la vidéo, je traite le son après. C’est moins facile et plus drôle qu’avec un cd où tu as deux heures de flûte chinoise, et où tu n’as plus qu’à te servir.


Je me suis peut être trompé, c’est un sample de Naruto, le dialogue en jap sur la 6eme piste? On trouve pas mal de samples asiatiques dans le dub…

Stéphane : Je ne suis pas sûr pour Naruto, il faudrait que je vérifie. Je ne suis pas super fan des mangas. Je suis par contre gros amateur de films japonais, ou HK, avec leurs sons super amplifiés, leurs musiques. Si tu regardes des films HK, tu vas en reconnaître des samples de Kaly. Les dialogues avec des mecs qui sont jetés par la fenêtre avec des samouraïs, des ninjas, genre YAAAAYYAAAH ! (rires). J’aime les films asiat’, ils ont des effets spéciaux sur les sons, se tapent des bons délires en passant de grosses reverbs sur les voix. Les français ne font pas ça, les américains un peu. Mais les films HK, des qu’il y a une scène de combat, il y a des reverbs de partout, des sons de phaser… J’aime vraiment utiliser ça.


Pour les futurs lives  c’est assez proche du disque ? On a vu que Brain Damage allait réadapter totalement son dernier album pour la scène…

Stéphane : Non, on a  des morceaux que nous avons réadaptés pour la scène. Quand tu digères un disque que tu viens de boucler, il y a toujours des moments où tu te dis que telle ou telle partie pourrait être plus longue, plus profonde. Donc en live, on tente de le faire.

Thibault : Genre Ravmone.exe, on est en plein dessus là. Il est complexe, on ne l’a pas joué pour le moment, mais il va être bon.

Kaly Live…en Live.Stéphane : Ce coté Venetian Snares, c’est pas très dansant. Le problème, c’est qu’en concert, les gens ont envie de danser, surtout à la fin d’un set, et là c’est trop rapide. Donc on essaie d’adapter pour que les morceaux soient dansants, qu’ils groovent, mais qu’il y ait quand même du Break. On a aussi See No Sense, qui part en Techno à la fin, on l’a bien réadapté. On essaie de réarranger certains morceaux, on rallonge les parties quand c’est bon, pour garder les poils levés plus longtemps ! (rires)


Vous allez tourner un peu à l’étranger ?

Stéphane : Là on va en Suède, à Montréal, et en Bosnie en Juillet. On a peut être aussi des échanges qui vont se faire avec des anglais. Et on a déjà surtout fait les coins Ouest de l’Europe, Belgique, Hollande, Allemagne, Suisse…


Le dub d’aujourd’hui, vous le voyez comment ?

Thibault : Niveau dub français ? Il a toujours eu la possibilité de s’ouvrir vers d’autre horizon. Mélanger les styles. C’est intéressant, mais il faut faire attention de ne pas trop se disperser et tomber dans une musique Patchwork, pour garder un peu l’identité du dub français. On ne pourra pas faire mieux que le mec qui fait du Rock depuis 15 ans. Il faut faire la musique que l’on sait faire et tâtonner vers d’autres gens dans le même temps.

Stéphane : Mais après, sur Kaly on n’a pas trop de barrières, juste que notre spécialité est d’avoir ce coté Dub. C’est ce qui fait l’identité Kaly. Mais on se mélange avec tout, on est hyper ouvert, on veut vraiment tester de nouvelles choses. La MAO par exemple. On a tous des Side-project très différents, et cela nourrit clairement la musique de Kaly, et sa diversité. On n’a donc jamais fait de disque trop uniforme, sauf sur Hydrophonic, mais c’était volontaire. On voulait faire un pavé un peu Dub-dark sur celui là.


La Question qui fâche : Quand on parle de “Dub”, on est maintenant obligé de mettre “Step” après ? Que pensez-vous de la place prépondérante du Dubstep depuis deux ans ?

Thibault : Le Dubstep est assez régénérateur. Je trouve ça cool. Il y a une syncope nouvelle, une conception qui n’est pas propre au dub. Le problème, c’est justement que l’on commence à nous en servir à toutes les sauces. C’est la nouvelle Drum’n Bass en fait. Il y a 10 ans, il y avait des soirées Drum’n Bass de partout, et au bout d’un moment, cela devenait super rébarbatif, toujours pareil, toujours les mêmes lignes rytmiques. Il ne faudrait pas que le Dubstep tombe là dedans. C’est un système musical qui fonctionne super bien, mais la recette commence à être un peu trop déclinée. Enfin, c’est comme dans toutes les musiques, à partir du moment ou le mec se prend la tête pour sortir un univers personnel, ce sera toujours quelque chose d’intéressant.


Pour finir, un disque de Dub à conseiller, pour ceux qui ne connaissent pas forcément le genre ?

Stéphane : Pour ne pas avoir de racine Reggae, pour moi c’est vraiment Barbary de Ez3kiel. Il y a aussi un disque que j’aime beaucoup, c’est le disque Megaton Dub de Lee Perry, qui a une profondeur énorme.

Thibault : Moi je pense qu’il y a un album Dub qui a marqué beaucoup de groupe sur Lyon, c’est le Massive Attack remixé par Mad Professor, No Protection. Celui là, tu l’écoutes, tu prends pas mal de disques Dub, et tu te rends contre qu’il y a une vraie filiation. La scène Dub de Lyon s’est prise ce disque en pleine gueule. Tu le replaces avant notre premier disque, ou lOpus Incertum de High Tone ; tu comprends pas mal de choses… Mad Professor a fait pas mal de trucs aux kilomètres, mais celui là, il est vraiment énorme…

Stéphane : Sinon pour parler dans un domaine plus large, il y a le Dummy de Portishead. Les rythmes lents lourds ne sont pas si éloignés du Dub. Le nouveau sort enfin d’ailleurs, j’ai écouté Machine gun, ce morceau est monumental.


Merci à Kaly Live Dub et Clair de 4Promo. “Fragments” sorti le 07 avril 2008.